dimanche 21 janvier 2018

FAST EDDIE CLARKE PART 2

"Le succès monte à la tête, l'argent circule sans que le groupe ne puisse réellement en profiter. "

Lorsque Motorhead apparaît pour la première fois à la télévision à l'émission Top Of The Pops pour jouer leur nouveau simple, « Louie Louie », qui vient d'entrer à la 75ème place des classements, Clarke est en bleu en train de repeindre un bureau de bookmakers. Il demande au patron de tourner la télévision du bureau, et exulte : « C'est moi à la télé ! ». Le chevelu qui repeint, c'est effectivement le guitariste légendaire de Motorhead. La suite, ce sera une chevauchée ahurissante de quatre années de tournées et d'albums. Le trio devient le premier symbole d'un Heavy-Metal sans concession, débarrassé de ses oripeaux hippies. Après Motorhead, Judas Priest opte pour l'uniforme de cuir et de clous fin 1978, début 1979. Le trio est le plus implacable, le plus puissant, le plus intransigeant, le plus intègre des groupes de Rock anglais.

Le disque Bomber publié en octobre 1979 est l'occasion de découvrir Clarke au chant. Selon Lemmy, un caprice de guitariste en manque de reconnaissance, selon le guitariste, la volonté du bassiste d'encourager Clarke à se mettre en lumière dans le groupe. Le morceau sera un Blues miraculeux, collant aux tripes : « Step Down ». La gouaille Punk de Clarke colle à merveille sur ce morceau fragile. Il enregistrera aussi une version de « Stone Dead Forever », mais il préférera garder la version de Lemmy au chant. A l'écoute de cette version, on distingue ce qui ressemble fort à Metallica à ses débuts. Sur Bomber, Clarke fait rugir la wah-wah, décoche riff sur riff, et fait un malheur, bien autant qu'Overkill. Avec Ace Of Spades, il opte définitivement pour la Fender Stratocaster et sa tonalité coupante qui contrebalance si bien avec la basse Rickenbaker de Lemmy. Vic Maile, le producteur, leur définit un son dur et coupant, où les scories psychédéliques de Clarke n'ont plus beaucoup de place. No Sleep 'Til Hammersmith, leur premier album en concert, se classe numéro un des classements anglais. Motorhead est une star populaire.

Le succès monte à la tête, l'argent circule sans que le groupe ne puisse réellement en profiter. Clarke commence à se sentir isolé, Lemmy et Taylor étant en permanence au coeur d'une orgie de groupies et de speed. Clarke picole de la vodka depuis maintenant cinq ans, mais reste un homme discret et intègre. Il est attentif à l'image de ce qu'il considère tout autant que les autres comme son groupe. L'affichage de je-m'en-foutiste des deux autres commence à l'agacer sérieusement. Pour Fast Eddie, Motorhead a une éthique implacable, et c'est ce qui plaît aux fans. Cela plaît moins à Lemmy et Taylor, qui commencent à trouver Clarke sérieusement chiant et rabat-joie. Pourtant, le guitariste a raison. Ils se sont forgés une image de desperados Rock absolus, cela implique un travail constant en matière de musique, et une communication intense et briffée. Il estime que les épreuves des années de misère ont forgé leur identité et leur amitié, et rien ne doit briser cela.

La tension est telle que Clarke se fait virer en mai 1982 en pleine tournée US. Les explications de Clarke ne sont guère flatteuses pour les deux autres, qui se sont montrés aussi prétentieux qu'inutiles, voire dangereux. Dans un souci d'éthique, Clarke se met en colère suite à un duo de Motorhead avec la chanteuse Wendy O'Williams, que Lemmy admire surtout pour sa poitrine. Fast Eddie la trouve carrément nulle, et refuse de finir la production du disque, lui qui a hérité de la production des disques de Motorhead quelques mois auparavant avec l'album Iron Fist. Lemmy calme le jeu, et lui annonce que le disque sortira sous le nom de Lemmy et Wendy. Clarke finit le travail, et en remerciement, Taylor et Kilmister arborent des tee-shirts Plasmatics, le groupe de Wendy O'Williams sur toute la tournée canadienne. Clarke commence à trouver la plaisanterie lourde, et les choses finissement par s'envenimer au point que Clarke restera enfermé seul dans sa chambre d'hôtel, un molosse gardant la porte et ne l'autorisant à sortir que pour assurer les deux derniers concerts. Puis, il sera mis dans l'avion, sans son matériel, resté sur la route.

Une fois revenu en Grande-Bretagne, Clarke traîne sa dégaine dans la rue, esseulé, une bouteille de vodka dans la poche. Il finit par rencontrer le bassiste Pete Way, lui aussi fraîchement débarqué de son groupe de coeur : UFO. Les deux montent donc leur propre groupe : Fastway. Ils cherchent d'abord un batteur. Clarke rêve d'avoir celui d'Humble Pie : Jerry Shirley. Ca tombe bien, le bonhomme est décorateur d'intérieur depuis la seconde séparation d'Humble Pie en 1981. Clarke et Way font cinquante bornes pour le recontrer dans un pub, Shirley arrive en bleu, couvert de peinture. Il repartiront tous largement imbibés. Fastway a son batteur.


Seconde étape : il faut un chanteur. Une audition est lancée, et la cassette d'un jeune homme irlandais fait mouche : Dave King. Et puis, Way est rappelé par son label : il ne peut signer le contrat du premier album de Fastway, car il est chez CBS, et Way est toujours lié à celui de UFO : Chrysalis, dont les conditions furent minables. Fastway conserve son nom, mais perd son bassiste. Il sera remplacé par Richard MacCracken, un ancien de Taste de Rory Gallagher. Ce bel équipage fait un carton aux USA, à la grande surprise générale. Le premier album s'écoule à 500 000 exemplaires aux Etats-Unis, mais le succès ne se confirmera pas. Fastway Mark I meurt fin 1984, et Clarke perd peu à peu pied. Il finit par se laisser guider, bouffé par son alcoolisme et la dépression. (à suivre)

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