samedi 17 août 2019

BLACK PYRAMID


"Cet agrégat donna un élixir magique qui allait alimenter trois magnifiques albums et quelques simples tout à fait enthousiasmants. "





Ils ont invoqué les forces de la Pyramide Noire pour élever leur musique vers d'autres cieux, mais malheureusement, le Massachusetts et son morne quotidien aura happé ces guérillos du Stoner-Metal et les a ramené à l'anonymat qu'ils auront bien peu quitté. Le ventre des Etats-Unis grondent de ces groupes undergrounds pratiquant un Heavy-Rock sans concession, imbibé de références aussi pointues que totalement dépassées : Black Sabbath, Budgie, Led Zeppelin, Pentagram, mais aussi quelques valeureux défricheurs soniques des années 90 comme Kyuss et Sleep. A cela s'ajoute une férocité noire qu'il faut plutôt aller chercher du côté du Heavy-Metal européen des années 80 : Iron Maiden, Celtic Frost, Mercyful Fate, et une petite pointe de Punk américain. Cet agrégat donna un élixir magique qui allait alimenter trois magnifiques albums et quelques simples tout à fait enthousiasmants. 


Fondé à Northampton dans la banlieue de Boston par le guitariste Andy Beresky, Black Pyramid est devenue la chose du batteur Clay Neely. Le bassiste Eric Beaudry les rejoint en 2007. David Gein remplace rapidement Beaudry, et le groupe est désormais prêt à mordre. Il se fait les dents dans les clubs du Massachusetts, et ses concerts redoutables finissent par attirer l'attention d'un label spécialisé Stoner allemand grâce à leur première démo, Electric Earth. Le premier simple est publié dès 2008, et le premier album éponyme, distribué aux Etats-Unis par Meteorcity, en 2009. Fortement influencé par Sleep et le premier album de High On Fire, Black Pyramid développe néanmoins son propre univers de Stoner-Metal noir, incantatoire et psychédélique. Les guitares sont abrasives, la rythmique implacable, le chant obsédant. Les compositions sont de tout premier ordre. Black Pyramid développe des climats. Il aime à changer de riff afin de créer des progressions dans ses morceaux. Le solo est souvent concis, permettant un décollage en forme de shoot d'adrénaline, ou alors il rampe aux côtés de la rythmique pour renforcer le souffle lyrique du morceau. Quelques chansons font la différence : « Visions Of Gehenna », « Mirror Messiah » et une apothéose de trois morceaux épiques de plus de sept minutes chacun : « The Worm Ouroboros », « The Cauldron Born », et « Wintermute » à la belle introduction acoustique. Le groupe se fait une réputation flatteuse chez les amateurs de Stoner, mais cela ne suffit pas pour lui permettre de tourner hors des Etats-Unis. Black Pyramid part dans les conditions habituelles pour ces formations : un petit camion dans lequel on entasse musiciens et matériel, et tous les soirs, au bout de la route, un petit club dans une ville perdue, et parfois, un festival permettant de toucher un public plus large.


Cela ne décourage pas le moins du monde nos trois combattants, qui décident d'entreprendre  l'enregistrement d'un second album après un split-EP en compagnie du duo Old One en 2010. La compilation « Stormbringer » regroupant tous les morceaux publiés en simples arrive en mai pour faire patienter les amateurs. Meteorcity renouvelle sa confiance, et « II » sort avec pas moins de soixante minutes de musique au compteur. Elle a gagné en profondeur, mais aussi en dynamique, avec de vrais météores sonores capables de terrasser le plus septique des fans de Metal. « Endless Agony » et « Mercy's Bane » qui ouvrent le disque sont deux puissants météores qui ne laissent que des cendres derrière eux. La voix d’Andy Beresky a gagné en textures, et l'homme n'hésite pas à se lancer dans des lignes de chant plus audacieuses. « II » brille aussi par ses deux immenses pièces de résistance : le bouillonnant « Dreams Of The Dead » et l'incandescent « Into The Dawn », respectivement de douze et quinze minutes au compteur. Beresky développe des cathédrales de riffs lourds et entêtants, soutenu par une rythmique aussi implacable qu'inspirée. Trois simples dont un split single avec Tenspeed Warlock sont publiés en 2011. Black Pyramid joue relativement peu sur scène, Beresky appréciant peu la vie sur la route. Le trio assure néanmoins une seconde tournée américaine et sa première tournée en Europe, avec un passage au Roadburn Festival aux Pays-Bas. 

Le ver est pourtant dans le fruit. Andy Beresky est rattrapé par le quotidien, les factures à payer. Sa consommation d’alcool devient problématique. Black Pyramid est comme nombre de ses confrères, il est un groupe passion, qui permet d'évacuer les démons intérieurs et la frustration, mais n'assure pas de revenus suffisants pour vivre pleinement de la musique. Des dissensions entre les musiciens apparaissent, et Beresky quitte le navire à la fin de l'année 2011. Il semble que le trio, décapité de son guitariste-chanteur, est désormais condamné à abandonner.  

C'est pourtant mal connaître Clay Neely, qui va rapidement trouver un remplaçant à Beresky en la personne de Darryl Shepard. Le risque est grand de voir le groupe profondément modifié musicalement. Mais à l'écoute du nouveau split single avec les suédois de Odyssey en 2012, il n'y a aucune crainte à avoir. Neely et Gein, qui co-écrivaient l'ensemble des morceaux avec Beresky, détiennent la formule musicale de Black Pyramid. Shepard apporte du sang neuf, et l'album « Adversarial », paru en 2013 chez Hydro-Phonic Records, est la preuve éclatante de leur vitalité. Ce troisième album comporte notamment en ouverture le morceau « Swing The Scimitar », merveilleuse odyssée de granit et de cendres de plus de dix minutes. Il est brillamment suivi par deux superbes pièces épiques : « Aphelion », et « Onyx And Obsidian ». Après plusieurs semaines sur la route, Black Pyramid s'est mis en sommeil pour réfléchir à sa destinée. Clay Neely a rejoint le soleil de la Floride. Le simple « Open The Gates/Dead Star » en 2015 sera l'occasion pour le groupe de se dérouiller un peu et de se rappeler au bon souvenir de ses fans. Ils continuent à tourner sporadiquement, mais un nouvel album se fait attendre depuis maintenant quatre longues années. 



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