lundi 25 juillet 2016

RORY GALLAGHER 1974

"Si Rory Gallagher est timide et réservée à la ville, il n'en est pas de même sur scène, surtout sur ses terres."

RORY GALLAGHER Irish Tour '74 1974

Rory, petit frère irlandais trop tôt disparu, fit résonner sa guitare à travers la planète, sans relâche. Jusqu'à l'épuisement, jusqu'à sacrifier sa vie personnelle, il écuma les scènes, jouant soir après soir son Blues-Rock magique. Gallagher avait cela dans le sang, depuis qu'il a commencé la guitare. Depuis les débuts de Taste en 1966, avec deux copains de Cork. Un trio de Blues qui, en même temps que Cream et Jimi Hendrix Experience, mais à un niveau plus modeste, développa une musique électrique et irrévérencieuse. Le trio initial se disloqua à la demande de la maison de disques Polydor, qui venait de le signer. Le guitariste était excellent, mais le bassiste et le batteur pas au niveau. Rory n'en avait cure. Ce qu'il aimait, c'était l'interaction, l'aspect humain.

Avec l'arrivée de Richard MacCracken à la basse, et John Wilson à la batterie, le niveau technique était là, mais pas vraiment l'entente amicale. C'est que le guitariste était un être des plus sympathiques, mais aussi des plus déterminés. Il avait une idée précise de sa musique, et était un compositeur doué. Aussi, il n'y avait que peu de place pour les deux nouveaux, qui en 1970, après deux fabuleux albums couronnés d'un succès commercial et critique plus que notable, décidèrent de faire valoir leurs droits à participer à la composition, et donc aux droits d'auteur. A cela se greffa une vieille rivalité politique, tristement typique de l'Irlande : le conflit entre le Nord et le Sud. Gallagher n'en avait rien à faire de tout cela, mais les deux trublions originaires de Belfast mirent sur la table le fait que le leader de Taste était un homme de l'Irlande du Sud cherchant à les écraser. L'ambiance devint vite irrespirable, et la musique impossible à écrire. Il ne put donc que se résoudre à dissoudre le trio, et fonder le sien, à son propre nom, afin d'entamer une carrière solo.

La séparation de Taste sera une blessure profonde dans le cœur de Rory Gallagher. Il n'aura de cesse de surpasser cette douleur, que ce soit par ses textes, la richesse de sa musique, ou le succès critique, commercial et scénique de son groupe à son nom. C'est sans doute aussi ce qui apportera cette âme si particulière, ce Blues profond qui hante ses chansons jusqu'à sa mort. La désillusion du premier groupe de jeunesse, la médiocrité de l'homme et de ses conflits absurdes, apporteront une philosophie un peu amère à Rory. Il ne se départira pourtant pas de sa sincère gentillesse, une humanité qui transpire à chaque note, et se lit sur son visage jovial, déformé sur scène par la force de sa musique.

En 1974, Rory a déjà quatre albums à son actif, dont deux rien que l'année précédente. Chacun connaît un succès croissant qui permet au musicien de parcourir en 1973 L'Europe et les Etats-Unis, pour la première fois. Ils accompagnent deux formations extrêmement populaires aux USA : Deep Purple et The Faces. Durant ce tour mondial, il décide de réaliser une vraie série de concert dans son pays natal  en décembre 1973 et janvier 1974 : l'Irlande. Rory est alors de retour dans son pays pour les fêtes de fin d'année. A cette occasion, il en profite pour donner quelques concerts. Mais cette fois-ci, le contexte est différent. L'Irlande vit une période de guerre civile débutée dans les années 60 due à une ségrégation des droits civiques des loyalistes protestants pro-anglais contre les nationalistes catholiques irlandais. Les deux camps s'affrontent dans un conflit sanglant, surnommé avec un flegme tout britannique les Troubles, et attisé par les groupes armés comme l'IRA et l'armée britannique sur place. En 1972, une manifestation pacifiste de 20000 personnes est réprimée dans le sang par cette dernière, faisant 14 morts. Ce jour funeste sera appelé le Bloody Sunday. Il sera suivi par une victoire des loyalistes aux élections de l'Assemblée Nord-Irlandaise, et l'échec de la proposition des nationalistes d'une assemblée proportionnelle entre les deux camps. Les loyalistes, craignant un retrait de l'armée britannique et des représailles des nationalistes, reprennent fin 1972 leurs campagnes de violences. Les ghettos catholiques s'embrasent, et plusieurs attentats et exécutions ont lieu durant l'année 1973. Les rapports entre loyalistes et gouvernement britannique se détériorent suite à ces actes. Les premiers lancent une grève générale qui engendrera sept morts du côté catholique. L'IRA répond par des attentats. C'est dans ce climat que le Rory Gallagher Band se lance dans sa tournée irlandaise.

De plus, le groupe a vu sa popularité croître en un an de manière significative. Suffisamment pour que trois chaînes de télévision fassent des propositions de documentaire dans ce contexte difficile. Mais soucieux de ne pas voir ces concerts détournés de manière politique, Rory Gallagher opte pour un tournage indépendant. Trois concerts seront captés, sur bandes et en film, afin de célébrer le retour du héros au pays. Il n'y en aura pas plus. D'abord parce que le management obtient péniblement l'autorisation de l'armée britannique de permettre un concert à Belfast, et ce grâce à la notoriété nouvelle de Rory. Ensuite parce que le studio mobile d'enregistrement, le Ronnie Lane Mobile, sera bloqué par les autorités britanniques avant sa traversée de la Mer d'Irlande, faisant rater la captation du premier concert.

Et le tournage ne sera pas des plus simples non plus. Tony Palmer est chargé du tournage. Il s'agit d'un long-métrage tout simple, avec de généreux extraits de concerts, des interviews des protagonistes sur la tournée, et des impressions de Rory sur son retour au pays. Mais afin d'illustrer un peu le contexte, Palmer part dans les rues de Belfast prendre quelques vues de la ville, ce qui déplaira fortement à l'armée britannique, qui stoppera le tournage une journée et donnera ses consignes au réalisateur.

Le Irish Tour '74 sera malgré tout un succès, les salles sont pleines à craquer, et le Band fait un véritable tabac tous les soirs. Le concert de Belfast a lieu dans le Hall de la ville, qui n'est autre qu'une salle de bal. Le son est épouvantable, résonnant comme un hangar de marchandises. Pourtant, le groupe réussit le tour de force d'offrir une prestation au son étonnamment bon, et d'une qualité musicale de haut vol. Devant un public irlandais meurtri, le Blues de Gallagher sonne d'une intensité toute particulière. La douleur des notes entre en symbiose avec celle de ce petit peuple martyrisé par un conflit religieux absurde vieux de trois siècles. Pendant deux heures, les deux camps se retrouvent en paix, devant un porte-parole malgré lui d'un pays à feu et à sang, mais dont la générosité et le talent soignent toutes les blessures. Rory offre ainsi le temps d'un concert un peu de chaleur humaine là où il n'y en a plus.

Le Rory Gallagher Band a trouvé une incarnation stable depuis deux ans, avec le fidèle Gerry MacAvoy à la basse, présent depuis les débuts en solo de Gallagher, Rod DeAth à la batterie, et Lou Martin au piano électrique. Ce dernier vient étoffer le son du trio initial, et permettre de soutenir le guitariste durant ses improvisations, tout en trouvant un partenaire soliste. Lou Martin est un ancien musicien de l'excellent quintet de Blues Killing Floor, qui produira deux albums marquants. Suffisamment en tout cas pour embaucher Martin à ses côtés, persuadé que leur association sera fructueuse. Et il avait raison, le bougre.

Le double album initial, Irish Tour '74 est un des tous meilleurs albums en concert de toute l'histoire du Rock. Généreux comme son auteur, il transpire l'énergie, l'inspiration, la complicité, le plaisir de jouer. Le public est en transe, répondant à toutes les sollicitations au quart de tour. L'électricité est sur scène et dans la salle.

C'est avec ce disque que je vais commencer mon odyssée dans l'univers magique de la musique de Rory Gallagher. Pour moi, le guitariste-chanteur de Blues-Rock solo n'est pas forcément quelque chose qui me fascine. Il ressemble davantage à Eric Clapton ou Robert Cray au début des années 90. C'est une musique rébarbative, terne, avec des musiciens au garde-à-vous, ne cherchant surtout pas à faire d'ombre au patron. Je saurai découvrir bien plus tard l'oeuvre de Clapton, mais pour l'heure, tout cela me fait peur. Et si cet irlandais était un chiant du manche ? Dès les premiers accords de « Cradle Rock », l'attaque en picking solo ponctué de grognements possédés, le doute est totalement balayé. Ce petit gars a de la poigne et du coeur. Il ne pouvait en être autrement d'un type portant jeans, chemise à carreaux et vieille Stratocaster râpée. Il avait l'âme du prolétaire, Rory, et savait faire plaisir à ce public ouvrier qui venait l'acclamer autant que Status Quo.

Il a aussi le sens du groupe, Rory, n'hésitant pas à présenter tout le groupe dès la fin du premier morceau. C'est qu'ils sont devenus sa famille. Donal, le frangin, est bien là pour assurer le management, mais c'est avec ses musiciens qu'ils passent le plus de temps. Alors il veut les conserver le plus longtemps pour obtenir la cohésion d'un vrai gang. Ils partagent tout : repas, concerts, la bière après le show. Il n'y a guère que les filles. Pas que Rory n'y goûte pas, mais en véritable puriste, l'homme a décidé de sacrifier toute potentielle vie de famille pour vivre sa passion de musicien. Et comme il n'est pas du genre baiseur sous défonce, il ne préfère pas s'attacher. La seule à pouvoir partager son lit est sa Fender Stratocaster achetée en 1964 qu'il ne quitte pas, et dont la peinture s'écaille sous sa transpiration, soir après soir.

Si Rory Gallagher est timide et réservée à la ville, il n'en est pas de même sur scène, surtout sur ses terres. « Cradle Rock » est un sacré coup de fusil. Dès l'introduction, et l'arrivée de la rythmique, il ne lâche plus son public, mordant la chair comme un chien affamé. Il va nous vriller le cerveau de son Blues-Rock puissant et agressif. Pourtant, il ne s'agit aucunement de Hard-Rock au sens où on l'entend. La musique de Gallagher est ancrée dans un Blues noir séculaire, mais aussi dans la musique traditionnelle irlandaise, ce qui lui donne ce lyrisme si particulier. De ce fait, chaque morceau est un voyage vers des horizons magiques, et ce d'autant plus qu'il est un soliste et improvisateur de premier ordre, jamais rébarbatif, jamais prétentieux. Aucun morceau ne dépasse les cinq minutes si cela n'est pas nécessaire. Et quand on atteint les dix, c'est que Rory a envie de causer.

« Cradle Rock » est pour lui l'occasion de faire la démonstration de sa technique de bottleneck, très particulière. En effet, il ne met pas le tube de métal sur son majeur, mais sur l'auriculaire. Cela lui permet ainsi de pouvoir toujours faire des accords et des solos sans slide, puis d'en incorporer quand il le souhaite. Cela exige une dextérité très particulière, dont il est l'un des rares à en être capable. Après ce «Cradle Rock » incandescent, il livre un premier Blues mid-tempo rustique mais redoutable : « I Wonder Who ». L'interprétation n'est jamais ennuyeuse, appuyée par une rythmique furieuse, et un piano électrique léger et toujours à bon escient.

Ce qui fait la grande incandescence du Rock de Gallagher, ce sont ses chansons. Il est un compositeur fabuleux, capable de mêler toutes ses influences dans un même morceau avec un naturel évident. « Tattoo'd Lady » est un exemple évident de ces Rock-songs efficaces et généreuses, à la mélodie joviale et entraînante. Le solo de Gallagher est puissant et concis, apportant toujours un plus à la mélodie, créant un crescendo d'émotions lors de l'écoute. « Too Much Alcohol » est un bon vieux Blues-Boogie redoutable, claquant dans le coeur des prolos du public. Rory y parle de boisson, de ces liqueurs aux couleurs ambres qui font oublier le merdier le temps d'une nuit. Notre héros goûtait à cela bien volontiers, en bon irlandais qu'il était. Les pintes de stout et le whisky n'étaient pas pour lui déplaire, mais il ne fut jamais un furieux alcoolique aux blagues débiles comme Motley Crue ou Ozzy Osbourne. Il est fort probable que la solitude lui pesait parfois, comme elle pesa plus tard sur les épaules du sensible Bon Scott, lorsque ce dernier se retrouvait seul tard le soir au comptoir du bar de l'hôtel, après avoir vécu la foule en délire deux heures avant. Gallagher se posa bien d'autres questions, à commencer par ce qui pouvait encore valoir plus cher entre sa musique et une vie de famille aimante. La comparaison avec son frère Donal fut régulièrement un défi pour ce célibataire convaincu mais peu sûr de lui.

« As The Crow Flies » est une superbe reprise d'une chanson de Tony Joe White, intermède acoustique où Rory se saisit de son dobro. Ce morceau remplace l'inusable « Going To My Hometown », morceau traditionnel irlandais que Gallagher jouait avec sa mandoline à chaque concert depuis trois ans. Il était l'occasion de faire taper du pied et des mains le public, comme une bonne chanson à boire. « As The Crow Flies » est un superbe Blues acoustique, à l'émotion intacte, lumineuse. Comme Bob Dylan et Neil Young, il utilise un porte-harmonica, jouant simultanément de la guitare. On ressent l'émotion des hautes plaines, le vent qui souffle sur celles de l'Arizona avec Neil Young comme sur celles, vertes d'Irlande, de Rory Gallagher.

« A Million Miles Away » est un des grands sommets de cet album. Sa mélancolie, son spleen prenant au ventre est un miracle sonore ultime. Rory y développe justement dans ses paroles la solitude d'après-concert, le salle de restaurant et le bar où il n'est qu'un anonyme après le gig. Il y évoque autant l'écart entre ces deux instants, que cette femme rêvée qu'il a laissé là-bas chez lui, pour partir sur la route. L'interprétation, les accords, la voix sont poignantes au possible, les viscères vrillées de douleurs amères. Le médiator trotte sur les cordes de la Stratocaster râpée, chantant une ballade irlandaise triste, avant que Rory ne joue sur le sustain pour créer des sanglots électriques qui traversent l'air de la salle silencieuse, subjuguée. Il chante, il pleure, il rit, le petit homme de l'Eire. Le public commence à frapper des mains en rythme, soutenant leur héros dans son chagrin.

Il décide aussitôt de le prendre à la gorge avec un bouillonnant Hard-Blues : « Walk On Hot Coals ». Gallagher fait la démonstration de tout son brio de guitariste, mais aussi de showman. Ravageant des kilomètres de riffs et de chorus électriques, ils carbonisent l'audience. Il ralentit en son sein le tempo pour jouer avec lui, décochant de petits soli en picking avant la reprise du thème et l'explosion finale. C'est une virée en bagnole, extraordinaire de vélocité.On court sur le bitume, la ligne blanche défile dans le rétroviseur. On sent son coeur palpiter de plaisir, rythmé par les accords de Rory.

Après ces deux compositions plus électriques, ils s'engagent sur deux pièces de musique plus authentiquement Blues. « Who's That Coming ? » débute par des embardées de bottleneck. Il en fait toute la démonstration sur ces dix minutes de Blues transpirant le bayou. Il ne le quitte pas pour la conclusion pour ce morceau évocateur : « Back On My Stompin' Ground ». Il est de retour chez lui, notre héros, et il joue le Blues, pour nous. Ces deux morceaux plus rustiques sont également deux compositions originales, ce qui fait que le sur dix morceaux et un double-album, on ne compte que deux reprises avérées. Gallagher était donc bien un compositeur doué, et pas uniquement un technicien et un arrangeur. « Just A Little Bit » est un Boogie-Blues improvisé en répétitions avant les concerts, et outre sa mélodie obsédante, conclut ce magnifique disque sur un profond sentiment d'humanité dans cette musique.

Sincère, généreux, ce disque est doté de toutes les qualités d'un grand enregistrement en concert, comme il y en a finalement bien peu. Rory Gallagher vient de mettre sur bande l'aboutissement scénique de morceaux de sa seconde partie de carrière d'une part, et un témoignage de ses concerts irlandais de fin d'année d'autre part, dans un contexte tendu. Sans faire de politique, il s'est affirmé, et a crée la bande-son d'une période trouble de son époque et de son pays. Le film, simple et humble, n'en sera que le témoignage visuel supplémentaire.



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5 commentaires:

Malvers a dit…

Bravo faudrait parler de lui tout les jours à la radio... mais ils peuvent pas ça détruirait à la base le système capitaliste... Si tu passes Rory à la radio, les masques tombent immédiatement, aucune apparence et superficialité ne tiendrait le choc tellement il s'incarne dans sa musique... encore qu'avec les cyniques qu'on traîne sur les ondes ils s'empresseraient de rire de sa chemise à carreaux et de son manque de conquête féminine... Plus sérieusement le premier mot qui me vient quand je pense à Rory, et tu l'as fort bien dit, c'est Générosité, le second, c'est amour le troisième c'est la Foi, le quatrième, la fusion des trois premiers: le Blues... Moi je l'ai découvert en prenant une rouste avec le "Deuce" je crois que tu en avais fait la chronique ou que tu le citais en référence...Puis a Millions milles Away...cette sacrée incarnation sonore de la mélancolie... l'épave échouée dans le vieux port, épuisée de désillusion... merde! Qu'elle beauté, le gugusse c'est comme si john lee hooker se mettait à jouer avec la harpe d'Alan Stivell et la passion d'un Mc Phee... Ce foutu Irlandais, sa gentillesse irradie de sa face... C'est lui qui finit toujours par me sortir de l'obscurité! Très belle Chronique, et en ces temps d'incompréhension, alors que d'innocents Syriens tout aussi victimes que nous se mangent nos missiles dans la gueule pour le plaisir de rassurer la masse... Alors qu'à la lecture des nouvelles dans l'aurore, l'horreur croasse, sa guitare et sa voix viennent me soutenir, refouler cette envie de gerber quand le regard se pose sur les horizons humains,"What In the World" sur les BBC Sessions! What in the World... merci pour la chronique...

Julien Deléglise a dit…

Merci pour d'apprécier mon humble littérature. J'ai hélas déjà lu des chroniques récentes sur Gallagher se moquant de son look et de sa vie absolument pas glamour ou croustillante. Pas de Porsche dans les vitrines, pas d'actrice X troussée en coulisse. C'est bien ça le gros problème avec Rory dans notre monde actuelle : ce qui fait toute sa beauté, c'est sa musique, sur disques comme sur scène. Tout est là, merveilleux, éblouissant de force émotionnelle. Il n'avait aucune arrière-pensée, aucun acte calculateur. Il buvait des bières et du whisky irlandais, jouait de la guitare, connaissait le Blues et le Jazz par coeur en véritable esthète. Il tâtait d'ailleurs du saxophone pas si mal que ça d'ailleurs. Il n'a pas insisté parce qu'il se trouvait mauvais, mais franchement, d'autres se seraient poussés du col pour moins que ça.
Nous sommes dans un monde de vitesse et de communication. On n'a plus le temps de réfléchir, on tourne la page en quelques secondes. Chaque catastrophe est oubliée dans les 48 heures, les guerres n'existent que le temps qu'on en parle. Rory, c'est tout le contraire : c'est une douzaine d'albums qu'il faut prendre le temps d'écouter, et ne pas se fier à sa bonne bouille et à son jean râpé.
Puisque tu parles de "Deuce", je l'ai effectivement chroniqué. Je te conseille par ailleurs les "Beat Club Sessions" (voir les disques sur la platine). Cet album retrace l'ensemble de sessions en concert à cette émission allemande, et ce entre 1971 et 1972. Il y a donc de superbes versions en direct des meilleurs morceaux des deux premiers albums de Rory, à mon sens, sûrement ses plus beaux.

Malvers a dit…

Le tout premier album, avec sa belle gueule en fondu noir, et le verso assis à la fenêtre sous la pluie, c'est celui dans lequel je vis peut être le plus! I can't believe it's true avec ce saxophone tellement simple et beau... ou I Fall appart, ou sinner boy ou For the last time... Tellement beaux... je vais donc aller voir ça si tu dis que c'est du live des deux premiers albums... Peut être même y aura t il un live de I'm not awake yet! A moins qu'elle ne soit trop compliquée à jouer en live. Son dernier Album aussi plus on l'écoute plus on y découvre des perles de désespoir... Mais celui peut être qui a le plus la lose, c'est Jinx, jamais entendu une telle violence émotionnelle... Si t'as des infos sur cette album je veux bien... Le morceaux Jinxed mais qu'est ce qui s'y passe??... l'harmonica... le héro de pas grand chose qui se bat contre l'absurdité de la malchance... les muscles tétanisées qui tressaillent sous l'électricité des notes... La rage contre la chienlit menée des punks et du reste de la pop...? Merci en tout cas

Julien Deléglise a dit…

"I'm Not Awake Yet" n'y est hélas pas, mais il y a bien d'autres merveilles : une version fantastique de "Sinner Boy", la plus belle interprétation de "JUst A Mile", "Crest Of A Wave", une dévastatrice "In Your Town", et la plus émouvante version de "I Could've Had Religion". Entre autres. C'est vraiment un superbe disque, le groupe est encore en trio, le son est excellent. Un achat indispensable à mon sens pour qui veut savoir qui est vraiment ce petit bonhomme.
"Jinx" est assurément un grand disque, dernier sursaut de résistance face au Metal, au Punk et à la Cold Wave, les synthétiseurs...De gros problèmes de santé commenceront à le tourmenter, espaçant de plus en plus ses parutions de disques. C'est une bonne idée ça, de parler de "Jinx", il va falloir que je me penche sur ce cas-là.

ladonna a dit…

Merci pour cette chronique honnête !
Oui, ses concerts étaient magiques et restent gravés dans ma mémoire.
Pour ceux qui n'ont pas connus l époque, il suffit de regarder l'enregistrement de << Bullfrog Blues, en 1980 dans l'émission Chorus.
Aujourd'hui, plus rien de cela ne serait possible ( barrières, vigiles etc...)
Régalez-vous avec ça :

https://www.youtube.com/watch?v=33Jaodra7AY