La nuit suivante commença comme la précédente : après un repas frugal fait de fruits et de branchages de bambous dont Tom ne goûta guère, sauf pour faire plaisir à Harry, ils allèrent se coucher.
Il passa néanmoins quelques temps à jouer avec les petits, qui l’avaient adopté. Calice et les siens vinrent ponctuer la soirée de leurs réflexions philosophiques : « Têêêêttttee de mooorrrtt !!!!! Alors les babouins, ça roule ? Alors Tom, on se rapproche du singe ?
- Ecrase Calice ! Hurla l’un des mâles.
- Il fait bon savoir voler, hein les gars ? On va prendre des bombes sur la gueule, ce soir ! Tête de mmmooooorrrrttt !
- Tu vas nous casser les oreilles encore longtemps Calice ? demanda vigoureusement Harry.
- Mais tu ne les entends pas , Ah oui ! C’est vrai que tu es sourd comme un pot, gros sac ! Demande à Tom ce qu’il entend ! »
Tom écouta alors au loin. Les insectes et autres bêtes de la nuit s’étaient tues. Un vrombissement sourd grondait au loin. Il ressentit en lui les sensations de peur aux commandes du B-52, celles de la Mort proche, respirant au rythme des pales des hélices.
Il sauta d’un bond, et dit à Harry de mettre la tribu en sécurité : « Mais où aller ? lui demanda-t-il ?
- Il n’y a pas une grotte quelque part ?
- Si vers la cascade.
- Allons-y, ne perdons pas de temps, ils seront là dans quelques minutes »
Harry se mit à grogner, appelant tous les singes à se réfugier. Les oiseaux dans les arbres s’envolèrent en pagaille à travers les cimes, caquetant dans tous les sens en une triste symphonie.
Des feuilles tombèrent en pluie à leur envol, et ils se précipitèrent en meute vers la grotte de la cascade. Les mâles jouaient leurs rôles de gardiens à merveille, couvrant la fuite des plus faibles vers l’abri.
Les femelles couraient en gémissant, les petits sur le dos, entraînées par les grognements des mâles qui ouvraient la voie.
Ils atteignirent bientôt la grotte, s’entassant les uns sur les autres dans le goulot sombre. Harry s’engouffra dans le tunnel alors que les premières bombes éclataient sur la plage.
Le grondement des bombes se rapprocha, des explosions éclairèrent l’obscurité, faisant jaillir des éclats de terres et de pierres dans l’abri. Les singes, comme Tom, se couvrirent la tête.
Des gémissements, des cris d’affolement retentirent. Il avait l’impression d’être encore une fois avec des hommes : face à la destruction, les êtres vivants réagissent tous pareils.
Mais aucun ne s’affola. Le bruit des bombes s’éloigna vers l’île voisine, celle des Japs. Des avions de chasse avaient décollé. Une bataille aérienne avait commencé. Les bombes sifflaient, des explosions éclairaient encore et encore l’entrée de la grotte.
Harry se tenait tranquille, à l’affût, les mains croisées, comme résigné. Il faisait sans doute plus preuve de courage que n’importe quel soldat américain. Son visage était grave, et ses yeux se perdaient dans le vide, parfois éclairé par la lumière jaune des explosions.
Le calme revint après un temps qui leur parut si long. Tom n’avait plus de montre, il n’avait plus de notion du temps.
Le petit jour pointa, et Calice entra comme une fusée dans la grotte : « Les Japs sont partis ! Les Japs sont partis ! Tout est fini ! »
Tous sortirent prudemment de la grotte, regardant la végétation désolée. Les mâles partirent devant. Harry entraîna Tom par le col, et ils rejoignirent la plage qui faisait face à l’île-base japonaise.
Des incendies éclairaient l’horizon. Ils aperçurent les cadavres désordonnés de soldats japonais et d’océaniens prisonniers. Le massacre avait été total, il ne semblait pas y avoir de survivant.
La respiration de Tom resta coupée quelques temps. Les singes retournèrent sonnés vers la forêt. Il resta seul sur la plage. Calice se posa sur son épaule : « Tu vas retourné avec tes amis ?
- Quels amis ?
- Ceux de ton camp.
- Je ne sais pas…
- Regarde ! Ils sont là ! »
Des navires américains longèrent la côte . nous étions assis sur la plage, sans réaction. Tom ne voulait pas les voir, il n’était plus dans leur camp.
« Tu vois Calice, je ne les rejoindrai pas. Ma vie n’est plus avec eux, mais avec vous. J’ai compris trop de choses avec vous, davantage que dans toute ma vie d’Américain moyen. Je veux rester avec vous.
- Ah ! Ah ! Bienvenue parmi nous, tête de mmmooooorrrrrrrrttttttt !!!!! »
Tom commença à s’établir définitivement avec ses nouveaux compagnons. La proximité des humains ne lui manqua même pas : les conversations, ne serait-ce qu’avec Calice suffisait largement. Il savait au fond de lui que sa compagne l’avait oublié depuis longtemps comme celles de ses camarades, et il découvrit la jouissance d’une nouvelle vie, celle de la nature. Faire partie intégrante de la faune et de la flore, voilà sa vraie place. Il partagea néanmoins son savoir d’humain en construisant des cabanes : Harry et les mâles les visitèrent avec crainte, comme un territoire inconnu. Ils découvrirent l’abri couvert, celui qui protègent des pluies et du froid.
Un petit village de singes, d’oiseaux se créa alors. Parmi eux, il y avait un homme, et puis bientôt des félins, et mêmes quelques reptiles intrigués.
En somme, l’Arche de Noé s’était échoué quelque part sur une île du Pacifique. Seules les chamailleries entre animaux terrestres et volants (sacré Calice) venaient ponctuer le calme de l’île.
tous droits réservés
Il passa néanmoins quelques temps à jouer avec les petits, qui l’avaient adopté. Calice et les siens vinrent ponctuer la soirée de leurs réflexions philosophiques : « Têêêêttttee de mooorrrtt !!!!! Alors les babouins, ça roule ? Alors Tom, on se rapproche du singe ?
- Ecrase Calice ! Hurla l’un des mâles.
- Il fait bon savoir voler, hein les gars ? On va prendre des bombes sur la gueule, ce soir ! Tête de mmmooooorrrrttt !
- Tu vas nous casser les oreilles encore longtemps Calice ? demanda vigoureusement Harry.
- Mais tu ne les entends pas , Ah oui ! C’est vrai que tu es sourd comme un pot, gros sac ! Demande à Tom ce qu’il entend ! »
Tom écouta alors au loin. Les insectes et autres bêtes de la nuit s’étaient tues. Un vrombissement sourd grondait au loin. Il ressentit en lui les sensations de peur aux commandes du B-52, celles de la Mort proche, respirant au rythme des pales des hélices.
Il sauta d’un bond, et dit à Harry de mettre la tribu en sécurité : « Mais où aller ? lui demanda-t-il ?
- Il n’y a pas une grotte quelque part ?
- Si vers la cascade.
- Allons-y, ne perdons pas de temps, ils seront là dans quelques minutes »
Harry se mit à grogner, appelant tous les singes à se réfugier. Les oiseaux dans les arbres s’envolèrent en pagaille à travers les cimes, caquetant dans tous les sens en une triste symphonie.
Des feuilles tombèrent en pluie à leur envol, et ils se précipitèrent en meute vers la grotte de la cascade. Les mâles jouaient leurs rôles de gardiens à merveille, couvrant la fuite des plus faibles vers l’abri.
Les femelles couraient en gémissant, les petits sur le dos, entraînées par les grognements des mâles qui ouvraient la voie.
Ils atteignirent bientôt la grotte, s’entassant les uns sur les autres dans le goulot sombre. Harry s’engouffra dans le tunnel alors que les premières bombes éclataient sur la plage.
Le grondement des bombes se rapprocha, des explosions éclairèrent l’obscurité, faisant jaillir des éclats de terres et de pierres dans l’abri. Les singes, comme Tom, se couvrirent la tête.
Des gémissements, des cris d’affolement retentirent. Il avait l’impression d’être encore une fois avec des hommes : face à la destruction, les êtres vivants réagissent tous pareils.
Mais aucun ne s’affola. Le bruit des bombes s’éloigna vers l’île voisine, celle des Japs. Des avions de chasse avaient décollé. Une bataille aérienne avait commencé. Les bombes sifflaient, des explosions éclairaient encore et encore l’entrée de la grotte.
Harry se tenait tranquille, à l’affût, les mains croisées, comme résigné. Il faisait sans doute plus preuve de courage que n’importe quel soldat américain. Son visage était grave, et ses yeux se perdaient dans le vide, parfois éclairé par la lumière jaune des explosions.
Le calme revint après un temps qui leur parut si long. Tom n’avait plus de montre, il n’avait plus de notion du temps.
Le petit jour pointa, et Calice entra comme une fusée dans la grotte : « Les Japs sont partis ! Les Japs sont partis ! Tout est fini ! »
Tous sortirent prudemment de la grotte, regardant la végétation désolée. Les mâles partirent devant. Harry entraîna Tom par le col, et ils rejoignirent la plage qui faisait face à l’île-base japonaise.
Des incendies éclairaient l’horizon. Ils aperçurent les cadavres désordonnés de soldats japonais et d’océaniens prisonniers. Le massacre avait été total, il ne semblait pas y avoir de survivant.
La respiration de Tom resta coupée quelques temps. Les singes retournèrent sonnés vers la forêt. Il resta seul sur la plage. Calice se posa sur son épaule : « Tu vas retourné avec tes amis ?
- Quels amis ?
- Ceux de ton camp.
- Je ne sais pas…
- Regarde ! Ils sont là ! »
Des navires américains longèrent la côte . nous étions assis sur la plage, sans réaction. Tom ne voulait pas les voir, il n’était plus dans leur camp.
« Tu vois Calice, je ne les rejoindrai pas. Ma vie n’est plus avec eux, mais avec vous. J’ai compris trop de choses avec vous, davantage que dans toute ma vie d’Américain moyen. Je veux rester avec vous.
- Ah ! Ah ! Bienvenue parmi nous, tête de mmmooooorrrrrrrrttttttt !!!!! »
Tom commença à s’établir définitivement avec ses nouveaux compagnons. La proximité des humains ne lui manqua même pas : les conversations, ne serait-ce qu’avec Calice suffisait largement. Il savait au fond de lui que sa compagne l’avait oublié depuis longtemps comme celles de ses camarades, et il découvrit la jouissance d’une nouvelle vie, celle de la nature. Faire partie intégrante de la faune et de la flore, voilà sa vraie place. Il partagea néanmoins son savoir d’humain en construisant des cabanes : Harry et les mâles les visitèrent avec crainte, comme un territoire inconnu. Ils découvrirent l’abri couvert, celui qui protègent des pluies et du froid.
Un petit village de singes, d’oiseaux se créa alors. Parmi eux, il y avait un homme, et puis bientôt des félins, et mêmes quelques reptiles intrigués.
En somme, l’Arche de Noé s’était échoué quelque part sur une île du Pacifique. Seules les chamailleries entre animaux terrestres et volants (sacré Calice) venaient ponctuer le calme de l’île.
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