samedi 20 mars 2010

BABY GRANDMOTHERS

"Baby Grandmothers, est, comment dire, au-delà de toute la hype anglaise et US."

BABY GRANDMOTHERS « Baby Grandmothers » 1968

Les arcanes du rock sont décidément impénétrables. Jusqu’à quand retrouvera-t-on des enregistrements estampillés 60’s-70’s ? Il est vrai que beaucoup de choses sorties récemment manquent cruellement d’intérêt, et on a parfois l’impression de râcler les fonds de tiroir. Mais là….
Ce disque est une pépite sidérante, et contrairement à Rabbit ou Paris, vous la trouverez aisément, puisque rééditée récemment. Le rock dit psychédélique, c’est-à-dire en gros gorgé de fuzz et de rythmiques hypnotiques, fut prolixe en groupes, mais pas toujours très inspirés.
Les chantres, les maîtres du genre furent entres autres Cream et Jimi Hendrix Experience, auxquels on peut ajouter les Yardbirds. Grâce aux génies guitaristiques dont ils disposaient chacun, à savoir Clapton, Hendrix, Beck ou Page, ces trois bands fournirent de grands moments instrumentaux très planants et électriques.
Baby Grandmothers, est, comment dire, au-delà de toute la hype anglaise et US. Si l’inspiration Cream – Jimi Hendrix est bien présente, ce power – trio est l’un des plus invraisemblables groupes de heavy-psyché.
Fondé sur les cendres des T-Boones en Suède en 1967, le guitariste Kenny Hakanson, le bassiste Goran Malmberg et le batteur Pelle Ekman décide d’envisager le rock de l’époque dans un tonnerre d’électricité. Excellents techniciens, ils bricolent leurs propres lampes d’amplis (qu’ils fourniront également aux Troggs), ou leur propre grosse caisse métallique, et non en bois. Le résultat de ces bidouillages sont de longues plages gorgées d’électricité sauvages, malsaines et prenantes, sortes de bad-trips redoutables.
Dés le vertigineux et fantomatique « Somebody Keeps Calling My Name », on est pris à la gorge par cette voix lugubre, et cette guitare au timbre blues, mais vacillant sous les coups de médiator et la chauffe à blanc des amplis Marshall. On est balloté dans un tourbillon cosmique qui s’étend à l’infini, c’est-à-dire sur l’ensemble des plages qui font entre 7 et 20 minutes. Et si la musique de Baby Grandmothers est pour beaucoup instrumental, on ne peut que rester pantois devant l’inspiration permanente des chorus de guitare qui n’est pas sans rappeler la meilleure guitare de Jimmy Page en 1969, mais avec ce quelque chose de barré en plus. Un peu comme si Syd Barrett avait rejoint Led Zeppelin. De « Berkagulen » à l’odyssée en deux parties de « Being Is More Than Life », on est plongé dans un univers délirant de gorgones et d’hallucinations urbaines, transformant les scènes du quotidien en visions d’épouvante.
Le son de l’enregistrement est bien évidemment très cru compte-tenu des moyens dont a pu bénéficier le trio à l’époque, mais il est tout de même incroyable qu’une telle formation n’est pas fait plus de bruit médiatiquement parlant. Trop bad-trip peut-être. En tout cas, il se dit que Jimi Hendrix resta sans voix devant leur prestation alors qu’ils se produisaient en première partie du Experience. Le Voodoo Chile dut redoubler de talent pour faire oublier les trois cinglés électroniques.
Toujours est-il que le trio ne survit pas à cet album, et le trio rejoint les Mecki Mark Men avant de disparaître définitivement dans l’oubli.
Il a donc fallu attendre près de quarante ans pour redécouvrir pareil miracle sonique, et se dire que l’archéologie rock’n’roll apporte parfois du bon. Dans tous les cas, c’est toujours avec amusement que je regarde les nouveaux groupes dits garages ou planants à la mode. Parce qu’en écoutant ce disque, vous trouverez le reste bien fade.
tous droits réservés

2 commentaires:

Anonyme a dit…

immense groupe. Enfin ce fut court. Mais immense.

JiCé a dit…

Complètement hallucinant! Excellent blog, au demeurant! Bravo!