MOTORHEAD « Another Perfect Day » 1983
Il y avait plus facile, plus évident comme première chronique de Motorhead, et notamment, “Overkill” de 1979, qui est mon autre disque préféré de tous les temps de Motorhead. Pourtant, j’écoute celui-ci en ce moment, et j’avoue y trouver énormément de saveur, bien plus que quand je l’ai découvert il y a quelques années. Mes oreilles étaient alors en érection devant le rock’n’roll sauvage de Lemmy Kilminster, Fast Eddie Clarke et Philthy Animal Taylor.
Et puis, en approfondissant la discographie du trio, je découvris ce disque. Sur le papier, ça avait l’air fabuleux : imaginez un peu la réunion du groupe le plus sauvage du heavy-metal anglais rejoint par la plus fine lame du légendaire et mythique Thin Lizzy, dont le « Live And Dangerous » me colle toujours le frisson, M. Brian Robertson.
Revenons à cette époque : le trio de Lemmy Kilminster a décroché un succès considérable en Grande-Bretagne grâce à son heavy-rock’n’roll. Les albums n’ont en effet eut de cesse de grimper dans les charts britanniques, pour aboutir à la première place avec le live « No Sleep ‘Til Hammersmith » en 1981. Fast Eddie Clarke, Lemmy et Philthy sont alors les anti-héros complets, alcoolo amateurs de bastons, d’acides, et de petites pépés, le tout clairement affiché sous un look de bikers ambigu, Lemmy affichant ses insignes nazis dont il fait collection. Pourtant, le rythme de tournées et d’enregistrements épuise les trois hommes, et dés 1981, des tensions naissent entre Lemmy et Clarke. L’enregistrement de l’album « Iron Fist » en 1982 est difficile. Le groupe cherche une nouvelle direction, car la formule du heavy à fond les gamelles commence à s’essouffler, et après le succès du live, les musiciens ont bien du mal à se renouveler. « Iron Fist » sera donc un poil plus mélodique, mais malgré de bonnes chansons, l’album se révèle en-deçà des précédents disques. La tournée ruine la belle amitié des trois compères, et en novembre 1982, Fast Eddie Clarke s’en va, lassé de la musique de Motorhead, et du leadership de Lemmy, particulièrement préoccupé par une série de duo avec ses copines, des Girlschool à Wendy O’Williams.
Lemmy et Philthy embauchent alors un vieux copain de biture, Brian Robertson. L’ex-guitariste de Thin Lizzy a toujours été un voyou, bagarreur, alcoolique et drogué. Même Phil Lynott, pourtant pas un saint, finit par le virer de Thin Lizzy à cause de son comportement, chose que Robertson aura bien du mal à se remettre. Mais c’est aussi un exceptionnel musicien et compositeur. Après avoir fondé Wild Horses pour deux disques, pas mauvais, il rejoint Motorhead à la demande de Philthy.
Dans un premier temps, la collaboration est fructueuse. Robertson, dont le jeu est largement plus virtuose et blues que Clarke, permet à Motorhead de s’ouvrir vers des horizons plus subtils. Le résultat est ce disque magnifique. Si le trio reste un groupe brutal et puissant, et ce grâce à la batterie survoltée et folle de Philthy, et la basse et le chant rauque de Lemmy, les mélodies se font plus travaillées.
En fait, Philthy et Lemmy posent une rythmique lourde et sauvage, celle de toujours, sur laquelle Robertson collent ses riffs et ses chorus subtils. Cela donne de fabuleuses étincelles, trop nombreuses pour toutes les citer. Cela commence par le monstrueux « Back At The Funny Farm », pour se terminer sur « Die You Bastard ». Entre les deux, il y a le lumineux « Shine », le magique et lyrique « Marching Off To War », et ou encore le mélancolique et lourd « Another Perfect Day ».
Robertson a tout simplement réussi le pari fou d’injecter de la profondeur et de la mélodie dans le gros moteur ronflant de Motorhead, pour propulser son heavy-metal vers des horizons plus larges, et permettant de ce fait au groupe de sortir de l’ornière de son metal bourrin.
Pourtant, les choses vont tourner au vinaigre rapidement. En effet, Robertson, refuse de jouer certains classiques du trio, comme « Overkill » ou « Ace Of Spades », pour les remplacer par des blues. La chose déclenche rapidement le courroux des fans, peu réceptifs à l’ouverture de Motorhead. De plus, ils critiquent aussi la dégaine de Robertson, pas motard, mais plutôt heavy-metal spandex, jugée un peu « tapette ». Et le guitariste lui-même ruine ses dernières chances en foirant quelques concerts à cause de son alcoolisme et de sa consommation d’héroïne. Tous ces éléments amènent Robertson à partir fin 1983, ce qui provoquent le départ de Philthy, qui juge Motorhead exsangue.
Pourtant, à l’écoute de lives de cette époque, on découvre un trio puissant, magistral, fier, et ayant atteint une maturité artistique qu’on lui contestait pourtant depuis toujours. Il faut écouter cette version de « Hoochie Coochie Man » sidérante, grise, métallique, halluciné froide, qui résonne dans la nuit comme autant de solitude.
Motorhead survivra jusqu’à nos jours, et Lemmy oscillera souvent entre son bon vieux heavy-rock, et des velléités plus commerciales afin de percer le marché US qui lui résistera toujours. Mais aucune de ces tentatives mélodiques n’atteindront le niveau de cet ovni de 1983, superbe de bout en bout, et dont la richesse ne se dévoile qu’à chaque écoute, par petites touches. Robertson traîne toujours sa dégaine dans des tribute-bands à Lizzy, et Lemmy s’est juré de ne plus jouer une note de cet album maudit de 1983 qui fut l’origine de l’explosion de son trio.
Il y avait plus facile, plus évident comme première chronique de Motorhead, et notamment, “Overkill” de 1979, qui est mon autre disque préféré de tous les temps de Motorhead. Pourtant, j’écoute celui-ci en ce moment, et j’avoue y trouver énormément de saveur, bien plus que quand je l’ai découvert il y a quelques années. Mes oreilles étaient alors en érection devant le rock’n’roll sauvage de Lemmy Kilminster, Fast Eddie Clarke et Philthy Animal Taylor.
Et puis, en approfondissant la discographie du trio, je découvris ce disque. Sur le papier, ça avait l’air fabuleux : imaginez un peu la réunion du groupe le plus sauvage du heavy-metal anglais rejoint par la plus fine lame du légendaire et mythique Thin Lizzy, dont le « Live And Dangerous » me colle toujours le frisson, M. Brian Robertson.
Revenons à cette époque : le trio de Lemmy Kilminster a décroché un succès considérable en Grande-Bretagne grâce à son heavy-rock’n’roll. Les albums n’ont en effet eut de cesse de grimper dans les charts britanniques, pour aboutir à la première place avec le live « No Sleep ‘Til Hammersmith » en 1981. Fast Eddie Clarke, Lemmy et Philthy sont alors les anti-héros complets, alcoolo amateurs de bastons, d’acides, et de petites pépés, le tout clairement affiché sous un look de bikers ambigu, Lemmy affichant ses insignes nazis dont il fait collection. Pourtant, le rythme de tournées et d’enregistrements épuise les trois hommes, et dés 1981, des tensions naissent entre Lemmy et Clarke. L’enregistrement de l’album « Iron Fist » en 1982 est difficile. Le groupe cherche une nouvelle direction, car la formule du heavy à fond les gamelles commence à s’essouffler, et après le succès du live, les musiciens ont bien du mal à se renouveler. « Iron Fist » sera donc un poil plus mélodique, mais malgré de bonnes chansons, l’album se révèle en-deçà des précédents disques. La tournée ruine la belle amitié des trois compères, et en novembre 1982, Fast Eddie Clarke s’en va, lassé de la musique de Motorhead, et du leadership de Lemmy, particulièrement préoccupé par une série de duo avec ses copines, des Girlschool à Wendy O’Williams.
Lemmy et Philthy embauchent alors un vieux copain de biture, Brian Robertson. L’ex-guitariste de Thin Lizzy a toujours été un voyou, bagarreur, alcoolique et drogué. Même Phil Lynott, pourtant pas un saint, finit par le virer de Thin Lizzy à cause de son comportement, chose que Robertson aura bien du mal à se remettre. Mais c’est aussi un exceptionnel musicien et compositeur. Après avoir fondé Wild Horses pour deux disques, pas mauvais, il rejoint Motorhead à la demande de Philthy.
Dans un premier temps, la collaboration est fructueuse. Robertson, dont le jeu est largement plus virtuose et blues que Clarke, permet à Motorhead de s’ouvrir vers des horizons plus subtils. Le résultat est ce disque magnifique. Si le trio reste un groupe brutal et puissant, et ce grâce à la batterie survoltée et folle de Philthy, et la basse et le chant rauque de Lemmy, les mélodies se font plus travaillées.
En fait, Philthy et Lemmy posent une rythmique lourde et sauvage, celle de toujours, sur laquelle Robertson collent ses riffs et ses chorus subtils. Cela donne de fabuleuses étincelles, trop nombreuses pour toutes les citer. Cela commence par le monstrueux « Back At The Funny Farm », pour se terminer sur « Die You Bastard ». Entre les deux, il y a le lumineux « Shine », le magique et lyrique « Marching Off To War », et ou encore le mélancolique et lourd « Another Perfect Day ».
Robertson a tout simplement réussi le pari fou d’injecter de la profondeur et de la mélodie dans le gros moteur ronflant de Motorhead, pour propulser son heavy-metal vers des horizons plus larges, et permettant de ce fait au groupe de sortir de l’ornière de son metal bourrin.
Pourtant, les choses vont tourner au vinaigre rapidement. En effet, Robertson, refuse de jouer certains classiques du trio, comme « Overkill » ou « Ace Of Spades », pour les remplacer par des blues. La chose déclenche rapidement le courroux des fans, peu réceptifs à l’ouverture de Motorhead. De plus, ils critiquent aussi la dégaine de Robertson, pas motard, mais plutôt heavy-metal spandex, jugée un peu « tapette ». Et le guitariste lui-même ruine ses dernières chances en foirant quelques concerts à cause de son alcoolisme et de sa consommation d’héroïne. Tous ces éléments amènent Robertson à partir fin 1983, ce qui provoquent le départ de Philthy, qui juge Motorhead exsangue.
Pourtant, à l’écoute de lives de cette époque, on découvre un trio puissant, magistral, fier, et ayant atteint une maturité artistique qu’on lui contestait pourtant depuis toujours. Il faut écouter cette version de « Hoochie Coochie Man » sidérante, grise, métallique, halluciné froide, qui résonne dans la nuit comme autant de solitude.
Motorhead survivra jusqu’à nos jours, et Lemmy oscillera souvent entre son bon vieux heavy-rock, et des velléités plus commerciales afin de percer le marché US qui lui résistera toujours. Mais aucune de ces tentatives mélodiques n’atteindront le niveau de cet ovni de 1983, superbe de bout en bout, et dont la richesse ne se dévoile qu’à chaque écoute, par petites touches. Robertson traîne toujours sa dégaine dans des tribute-bands à Lizzy, et Lemmy s’est juré de ne plus jouer une note de cet album maudit de 1983 qui fut l’origine de l’explosion de son trio.
Et pour vous faire une petite idée, voici "One Track Mind" et "Shine" à la BBC : http://fr.youtube.com/watch?v=4bez05AT1u4
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3 commentaires:
Brian, avait, à l'aide d'une Fender Telecaster (accordée très bas) réenregistré certaines parties de basses, afin de donner un semblant d'"harmonie" aux chansons, car Lemmy continuait de jouer comme une brute et à 120 bpm. Robertson, à ses dires, avait aussi rejoué quelques uns de ses chorus et phrasés. Et cela,toujours sournoisement, à des heures tardives où il ne risquait pas de se faire surprendre et surtout de subir les foudres de ses nouveaux compagnons de routes. La B.D. humoristique présenté sur la pochette intérieure du vynil (en 83), démontrait l'incompréhension des 2 bourrins à l'encontre de la culture musicale de Brian (et aussi son alcoolémie avancée). Il en résulte un album de qualité, qui, malgré les avis partagés à son encontre, fut classé dans les 10 meilleurs albums "Hard" de l'année.
en ce qui me concerne j'ai bien aime leur dernier album motorizer et en plus je vais surement aller les voir a paris.a+
Quand j'ai vu que tu avais consacré une notule à Motörhead, et commençant à connaître tes goûts iconoclastes, j'ai espéré le "Another.." avant de cliquer. Bingo !
"Du foie gras au lieu de l'habituelle terrine" avait, je crois, résumé Philippe Manoeuvre à l'époque où ce dernier pondait des papiers corrects.
C'est tout à fait ça. On peut comprendre l'attitude de Lemmy, traumatisé après le délitement pitoyable de son combo, qui a attendu 3 années avant de le ressusciter. Mais que cet album est bon !
"Shine" fait partie des meilleurs morceaux de Motörhead (le meilleur ?), mélodique, speed, addictif et illuminé (forcément) par le solo de Robertson. Des titres comme celui-là (et Marching off to War, son petit frère), Lemmy et ses futurs acolytes ne seront plus jamais capables d'en proposer par la suite, même si "1916" renfermera quelques subtiles pépites.
Perso, j'ai complètement lâché Motörhead après 1916 justement, l'orientation métallisante abordée au milieu des 90's ne m'ayant jamais convaincu.
Merci (encore !) à toi pour ta réhabilitation de ce petit chef d'oeuvre - mais j'ai cru remarquer que c'était un peu ton credo sur ce blog ! ;-)
Oyax.
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