TRAPEZE « Medusa » 1971
Je me suis toujours demandé si Mel Galley était un homme heureux ? Voilà en effet un bonhomme qui joua dans deux des plus grands groupes de hard-rock de tous les temps, Trapeze et Whitesnake, composa parmi les meilleurs titres du genre, et apporta à l’aide de son approche de la guitare des éléments rythmiques issus du funk et de la soul qui firent éclore le son métal des années 80.
Pourtant, malgré son pedigree impressionnant, on peut dire aussi que la carrière de Galley est une succession de tuiles hallucinantes. Regardons un peu : Trapeze, dont nous allons approfondir le cas, connaît un succès important aux USA, est sur le point de cartonner internationalement, quand son chanteur-bassiste se sauve pour rejoindre Deep Purple. Manque de bol, il s’agit de Glenn Hughes, rien de moins. Galley réussit à remettre à flot Trapeze, avant que Dave Holland, le batteur attitré du groupe rejoigne Judas Priest en 1979. Nouveau coup dur, qui met un coup d’arrêt au groupe en 1981. Galley retrouve l’espoir en rejoignant Whitesnake alors en pleine ascension, et enregistre avec eux « Slide It In » en 1983, qui est le premier carton US du combo de David Coverdale. Manque de bol, lors de la tournée, John Sykes, l’autre guitariste, lui massacre un bras durant une soirée de beuverie à cause d’une mauvaise chute. La carrière de Galley est alors stoppée nette, et depuis, il se consacre à des travaux de studio, ceux de son frère Tom, Phenomena, et joue quelques concerts, ne pouvant assurer plus du fait des séquelles de sa blessure. Et puis, comble du malheur, l’homme vient d’avouer être atteint d’un cancer en phase terminale, ce qui ne lui laisse que peu de temps à vivre.
Pourtant les débuts de Trapeze étaient prometteur. Commencé en quintet en mars 1969 en Grande-Bretagne, Trapeze est d’abord plutôt psyché brouillon. Le départ du clavier et du trompettiste laisse Trapeze en trio séminal, celui rassemblant Glenn Hughes à la basse et au chant, Mel Galley à la guitare, et Dave Holland à la batterie. L’orientation du groupe va alors vers des horizons plus hard-rock, avec une touche de blues et de soul chère à Hughes et Galley. Le résultat et ce disque, total antipode du premier.
La voix de Hughes s’est maîtrisée, et la guitare de Galley occupe tout l’espace de ses riffs syncopés et hards. Son jeu est unique, loin des stéréotypes bluesy des guitaristes heavy anglais de l’époque. Plus léger, moins gras (quoique), le son de la SG à Galley est électrique, puissant, dépourvu de toute boursouflure superflue. Tout est près de l’os, cathédrale rythmique et soliste vertigineux.
Confortablement calé sur la batterie impressionnante de Holland, dont il ne faudra jamais assez dire qu’il était au niveau de John Bonham, ni plus ni moins, Galley et Hughes délivrent sept merveilles de heavy-rock d’une rare puissance. Des lourd et funky-blues « Black Cloud », « Your Love Is Alright » ou « Touch My Life », aux menaçants et heavy-blues « Seafull » et « Jury », on est dans la musique d’anthologie, ovniesque en ce début d’années 70. On pourrait rapprocher Trapeze de Free pour le côté blues lourd, avec le groove et le feeling de Booker-T And The MGs pour les titres plus enlevés.
Mais l’intégration du son funk-soul est diffus, imprégné dans un son hard-heavy-blues typiquement anglais. Encore une fois, c’est dans la construction des riffs et des soli que l’on retrouve cette influence. Ici, point de cuivres et autres chanteuses gospel. La musique est un trio type Cream baigné dans le Deep South américain.
D’ailleurs, c’est dans ce même Deep South, et au Texas que Trapeze trouvera la gloire, remplissant des salles de 10000 personnes en quelques heures alors que le groupe ne fait que les clubs chez lui en Grande-Bretagne. Cet état de fait poussera le trio à partir aux USA. C’est ce qui expliquera sans doute le son soul beaucoup plus marqué sur le fantastique « You’re The Music…We’re Just The Band ».
Durant ces années, Trapeze bénéficiera du soutien de nombreux musiciens, et notamment John Bonham, qui, en grand fan du groupe, n’hésitait pas à venir jouer en rappel dés que Led Zeppelin était en tournée dans le sud des USA.
Et finalement, on ne se souvient souvent que de ces deux disques avec Glenn Hughes, notamment parce que ce dernier incorpora Deep Purple. Mais c’est oublier le reste de la carrière de Trapeze, qui offrit d’excellents disques, toujours empreints de ce son heavy et de ce funk puissant et rampant qui gonfle les baffles à leur en faire cracher les tweeters.
Tout est bon chez Trapeze, de ce « Medusa » à « Live in Texas – Dead Armadillos » en 1981. Mais si vous voulez commencer par un album, commencez par celui-ci. Car il synthétise l’excellence de ce fabuleux groupe, de la batterie puissante et carrée de Dave Holland, en passant par la basse ronflante et le chant soul de Hughes. Et puis il y a cette guitare exceptionnelle, totalement originale, synthétisant, je le répète, par un prodigieux miracle deux sons totalement antagonistes : le son lourd et pesant du heavy-rock avec le groove du funk et de la soul.
Alors oui, Mel Galley peut partir en paix. Qu’il sache que sa musique est exceptionnelle, qu’il a su, dans l’ombre des géants du hard-rock, imposer une patte inimitable qui fait encore fantasmer les Red Hot Chili Peppers. Qu’il sache enfin qu’il est un des jalons musicaux primordiaux du 20ème siècle, et qu’inconsciemment, vous avez déjà tous rêvé d’écouter telle synthèse musicale. Et Mel Galley vous l’offre sur un plateau d’argent.
Je me suis toujours demandé si Mel Galley était un homme heureux ? Voilà en effet un bonhomme qui joua dans deux des plus grands groupes de hard-rock de tous les temps, Trapeze et Whitesnake, composa parmi les meilleurs titres du genre, et apporta à l’aide de son approche de la guitare des éléments rythmiques issus du funk et de la soul qui firent éclore le son métal des années 80.
Pourtant, malgré son pedigree impressionnant, on peut dire aussi que la carrière de Galley est une succession de tuiles hallucinantes. Regardons un peu : Trapeze, dont nous allons approfondir le cas, connaît un succès important aux USA, est sur le point de cartonner internationalement, quand son chanteur-bassiste se sauve pour rejoindre Deep Purple. Manque de bol, il s’agit de Glenn Hughes, rien de moins. Galley réussit à remettre à flot Trapeze, avant que Dave Holland, le batteur attitré du groupe rejoigne Judas Priest en 1979. Nouveau coup dur, qui met un coup d’arrêt au groupe en 1981. Galley retrouve l’espoir en rejoignant Whitesnake alors en pleine ascension, et enregistre avec eux « Slide It In » en 1983, qui est le premier carton US du combo de David Coverdale. Manque de bol, lors de la tournée, John Sykes, l’autre guitariste, lui massacre un bras durant une soirée de beuverie à cause d’une mauvaise chute. La carrière de Galley est alors stoppée nette, et depuis, il se consacre à des travaux de studio, ceux de son frère Tom, Phenomena, et joue quelques concerts, ne pouvant assurer plus du fait des séquelles de sa blessure. Et puis, comble du malheur, l’homme vient d’avouer être atteint d’un cancer en phase terminale, ce qui ne lui laisse que peu de temps à vivre.
Pourtant les débuts de Trapeze étaient prometteur. Commencé en quintet en mars 1969 en Grande-Bretagne, Trapeze est d’abord plutôt psyché brouillon. Le départ du clavier et du trompettiste laisse Trapeze en trio séminal, celui rassemblant Glenn Hughes à la basse et au chant, Mel Galley à la guitare, et Dave Holland à la batterie. L’orientation du groupe va alors vers des horizons plus hard-rock, avec une touche de blues et de soul chère à Hughes et Galley. Le résultat et ce disque, total antipode du premier.
La voix de Hughes s’est maîtrisée, et la guitare de Galley occupe tout l’espace de ses riffs syncopés et hards. Son jeu est unique, loin des stéréotypes bluesy des guitaristes heavy anglais de l’époque. Plus léger, moins gras (quoique), le son de la SG à Galley est électrique, puissant, dépourvu de toute boursouflure superflue. Tout est près de l’os, cathédrale rythmique et soliste vertigineux.
Confortablement calé sur la batterie impressionnante de Holland, dont il ne faudra jamais assez dire qu’il était au niveau de John Bonham, ni plus ni moins, Galley et Hughes délivrent sept merveilles de heavy-rock d’une rare puissance. Des lourd et funky-blues « Black Cloud », « Your Love Is Alright » ou « Touch My Life », aux menaçants et heavy-blues « Seafull » et « Jury », on est dans la musique d’anthologie, ovniesque en ce début d’années 70. On pourrait rapprocher Trapeze de Free pour le côté blues lourd, avec le groove et le feeling de Booker-T And The MGs pour les titres plus enlevés.
Mais l’intégration du son funk-soul est diffus, imprégné dans un son hard-heavy-blues typiquement anglais. Encore une fois, c’est dans la construction des riffs et des soli que l’on retrouve cette influence. Ici, point de cuivres et autres chanteuses gospel. La musique est un trio type Cream baigné dans le Deep South américain.
D’ailleurs, c’est dans ce même Deep South, et au Texas que Trapeze trouvera la gloire, remplissant des salles de 10000 personnes en quelques heures alors que le groupe ne fait que les clubs chez lui en Grande-Bretagne. Cet état de fait poussera le trio à partir aux USA. C’est ce qui expliquera sans doute le son soul beaucoup plus marqué sur le fantastique « You’re The Music…We’re Just The Band ».
Durant ces années, Trapeze bénéficiera du soutien de nombreux musiciens, et notamment John Bonham, qui, en grand fan du groupe, n’hésitait pas à venir jouer en rappel dés que Led Zeppelin était en tournée dans le sud des USA.
Et finalement, on ne se souvient souvent que de ces deux disques avec Glenn Hughes, notamment parce que ce dernier incorpora Deep Purple. Mais c’est oublier le reste de la carrière de Trapeze, qui offrit d’excellents disques, toujours empreints de ce son heavy et de ce funk puissant et rampant qui gonfle les baffles à leur en faire cracher les tweeters.
Tout est bon chez Trapeze, de ce « Medusa » à « Live in Texas – Dead Armadillos » en 1981. Mais si vous voulez commencer par un album, commencez par celui-ci. Car il synthétise l’excellence de ce fabuleux groupe, de la batterie puissante et carrée de Dave Holland, en passant par la basse ronflante et le chant soul de Hughes. Et puis il y a cette guitare exceptionnelle, totalement originale, synthétisant, je le répète, par un prodigieux miracle deux sons totalement antagonistes : le son lourd et pesant du heavy-rock avec le groove du funk et de la soul.
Alors oui, Mel Galley peut partir en paix. Qu’il sache que sa musique est exceptionnelle, qu’il a su, dans l’ombre des géants du hard-rock, imposer une patte inimitable qui fait encore fantasmer les Red Hot Chili Peppers. Qu’il sache enfin qu’il est un des jalons musicaux primordiaux du 20ème siècle, et qu’inconsciemment, vous avez déjà tous rêvé d’écouter telle synthèse musicale. Et Mel Galley vous l’offre sur un plateau d’argent.
Un petit lien juste pour vous faire une idée de son talent. C'est à Castle Donington, avec Whitesnake en 1983 : http://fr.youtube.com/watch?v=cr3rnNJ_MCA&feature=related
Et ça, c'est Glenn Hughes qui joue en 2004 "Medusa" :http://fr.youtube.com/watch?v=rsl_ScR6ZUk
tous droits réservés
3 commentaires:
je connais plus free que trapeze mais ton article m' a encore donne envie de decouvrir ce groupe.
Good site, thanks! I really like it.
Bon alors là j'en reste médusé! Ce son...(vraiment différent du premier qui je l'avoue me plait mais nettement moins)...dire que je me sentais seul...Le "heavy blues" comme vous dîtes, c'est exactement ça! c'est terrible d'avoir raté ça, c'est terrible! Comment vais-je pouvoir supporter "lady gaga et les autres marioles" après avoir entendu ça...Ô je sens monter une glaciale ironie soulever par la pitoyable amertume...
Mais je vous remercie quand même beaucoup!
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