LED ZEPPELIN : "II" 1969
Je revenais à pied du centre-ville d’Albi. Depuis l’âge de six ans, j’avais avoué une préférence marquée pour le Rock. Ma sœur, de six ans mon aînée, m’avait fait découvert Téléphone, Police. En fouillant par moi-même, je découvris les Beatles, les Rolling Stones ou Jimi Hendrix. Mais ma première grande révélation fut les Who, notamment avec le « Live At Leeds ». Ce son heavy, lourd, bluesy me défonça les neurones pendant de longs mois.
Mon second choc musical, je m’apprêtais à le recevoir ce samedi-soir là. Je rentrais donc de mon magasin de disques favori. Nous étions en septembre, le temps était maussade, et la nuit tombait. Depuis quelques semaines, j’étais habité d’une colère sourde. Mers parents avaient décidé de déménager à Albi afin de quitter le Jura où j’étais né. Chacun a ses raisons, toujours est-il que je quittai la campagne et mes amis pour me retrouver dans un centre-ville nauséabond, et un état d’esprit bien loin de la réserve un peu frustre des Jurassiens. La mentalité albigeoise me choqua profondément : hâbleur, prétentieuse, faux-cul… Tout me traversa l’esprit. J’avais bien du mal à me faire des amis, car je n’avais rien à partager avec mes camarades. Ils aimaient draguer les minettes, parler cul et mobylettes, écouter de la Dance, et fumer des clopes dans le préau. J’aimais la campagne, la bande-dessinée, les voitures de rallyes et le Rock’N’Roll. En fait, le cul aussi, mais j’étais trop timide pour m’approcher de ces êtres inconnus.
Peu à peu, je perdis mon intérêt pour ce que j’aimais auparavant, sans doute aidé en cela par mon adolescence (j’avais quatorze ans), et je me plongeai à corps perdu dans la musique.
Depuis quelques temps déjà, je lisais des journaux et des livres sur l’histoire du Rock, et un nom revenait régulièrement : Led Zeppelin. Ils étaient les inventeurs du Hard-Rock. Or pour moi, le Hard-Rock, c’était une bande de chevelus crétins sans aucun sens de la mélodie. Pour moi, c’était Metallica, c’est-à-dire un des groupes préférés de mes camarades de classe (« Nothing Else Matter » faisait un tabac sur Fun Radio).
Malgré cela, rongé par une curiosité débordante, je me décidai à franchir le pas. Je réunis alors les cent francs nécessaire à l’album, et je choisis le « II » de Led Zeppelin.
Rentrer chez moi, j’enlevai la cellophane, et posai le cd sur ma platine. J’entendis un type tousser (Robert Plant), et une guitare lourde gronder (celle de Jimmy Page ). « Whole Lotta Love ». Et puis il y a cette voix incroyable qui se mit à rugir : « You need cooooooooolll mmmmmmaaaaaattte… ». Je restai pantois, scotché au sol. Tout dans ce groupe était bon, magique, incroyable de concision. Autant les Who font preuve d’unité, mais joue souvent en lead chacun de leur côté, autant Led Zeppelin apporte son talent instrumental pour assurer une fusion presque cosmique. C’est grand, c’est beau, c’est du Heavy-Blues. Je resterai à écouter « Whole Lotta Love » pendant trois jours avant de passer à la suivante. Le reste de l’album me procurera bien évidemment autant de plaisir.Je revenais à pied du centre-ville d’Albi. Depuis l’âge de six ans, j’avais avoué une préférence marquée pour le Rock. Ma sœur, de six ans mon aînée, m’avait fait découvert Téléphone, Police. En fouillant par moi-même, je découvris les Beatles, les Rolling Stones ou Jimi Hendrix. Mais ma première grande révélation fut les Who, notamment avec le « Live At Leeds ». Ce son heavy, lourd, bluesy me défonça les neurones pendant de longs mois.
Mon second choc musical, je m’apprêtais à le recevoir ce samedi-soir là. Je rentrais donc de mon magasin de disques favori. Nous étions en septembre, le temps était maussade, et la nuit tombait. Depuis quelques semaines, j’étais habité d’une colère sourde. Mers parents avaient décidé de déménager à Albi afin de quitter le Jura où j’étais né. Chacun a ses raisons, toujours est-il que je quittai la campagne et mes amis pour me retrouver dans un centre-ville nauséabond, et un état d’esprit bien loin de la réserve un peu frustre des Jurassiens. La mentalité albigeoise me choqua profondément : hâbleur, prétentieuse, faux-cul… Tout me traversa l’esprit. J’avais bien du mal à me faire des amis, car je n’avais rien à partager avec mes camarades. Ils aimaient draguer les minettes, parler cul et mobylettes, écouter de la Dance, et fumer des clopes dans le préau. J’aimais la campagne, la bande-dessinée, les voitures de rallyes et le Rock’N’Roll. En fait, le cul aussi, mais j’étais trop timide pour m’approcher de ces êtres inconnus.
Peu à peu, je perdis mon intérêt pour ce que j’aimais auparavant, sans doute aidé en cela par mon adolescence (j’avais quatorze ans), et je me plongeai à corps perdu dans la musique.
Depuis quelques temps déjà, je lisais des journaux et des livres sur l’histoire du Rock, et un nom revenait régulièrement : Led Zeppelin. Ils étaient les inventeurs du Hard-Rock. Or pour moi, le Hard-Rock, c’était une bande de chevelus crétins sans aucun sens de la mélodie. Pour moi, c’était Metallica, c’est-à-dire un des groupes préférés de mes camarades de classe (« Nothing Else Matter » faisait un tabac sur Fun Radio).
Malgré cela, rongé par une curiosité débordante, je me décidai à franchir le pas. Je réunis alors les cent francs nécessaire à l’album, et je choisis le « II » de Led Zeppelin.
Bien sûr, ma rage intérieure m’orienta vers les titres les plus lourds, les « Lemon Song », « Heartbreaker », ou « Bring It On Home ». Maiss peu à peu, j’ai découvert l’autre facette du Zep : ces titres lents qui montent en puissance pour éclater dans un maëlstrom de décibels intersidérals. Je fus donc émerveillé par les « Thank You », « Ramble On », ou le somptueux « What Is And What Should Never Be ».
Led Zeppelin devint donc mon second groupe de chevet. Je me procurai rapidement les autres albums, et ne m’en remis jamais. Il y avait pourtant longtemps que je n’avais pas réécouter ce « II ». sans doute est-ce parce que je l’ai trop écouter, ou tout simplement parce qu’il cristallise ces souvenirs douloureux. A moins qu’il représente une force intacte, intouchable, celle qui me permit de me démarquer de mes camarades, et de ne pas hésiter à leur dire merde. Que je n’étais pas un imbécile parce que je ne faisais pas comme eux, et que l’on pouvait s’amuser autrement. Quant au sexe, ce disque me dévoila une énergie folle. Et que l’on n’avait pas tout le temps à parler comme un niais à une gonzesse, qu’on pouvait également lui raconter des choses vicelardes et ouvertement sexuelles avec une élégance folle. Je me rendis également compte plus tard que je n’avais ni la voix, ni le physique de Robert Plant. Toujours est-il que ce disque fut le point de départ de ma passion pour le Hard Rock’N’Roll, et que j’étais maintenant définitivement infecté. Et que plus jamais je ne serai comme avant, parce que comme une pucelle, j’avais perdu mon innocence. Et que la seule beauté que je continuerai à admirer, c’est celle de cette musique.
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