
"Ce n’est pas le cas du sommet de ce disque : « Schoolgirl ». Rien que le titre a ce quelque chose de vicieux. "
ARGENT : « Argent » 1970
Est-ce parce qu’après les fêtes on en manque cruellement que je vous parle d’Argent ? La blague est fort facile, mais néanmoins, je crois pouvoir dire sans trop me tromper que vous n’aviez pas réellement éprouvé le besoin de le dépenser pour acheter ce disque, votre argent. Et pour cause, Argent est un groupe que bien peu connaisse. Je vais même être d’une violence rare : tout le monde se fout totalement de ce groupe.



Mais l’on en est pas encore là, et le Rock a encore de la classe à l’époque, du moins un but autre que celui de faire du pognon. Argent arrive pourtant après la guerre, comme le « Odessey And Oracles » des Zombies. C’est-à-dire qu’il loupe le Hard-Rock, le Rock Progressif et le Rock Psychédélique de l’époque. Ne cherchez donc pas ici les échos d’un Led Zeppelin ou d’un Jethro Tull ici.

Argent, c’est donc un groupe qui arrive après la bataille. C’est-à-dire qu’il joue un rock entre pop et psychédélisme débutant, faisant la part belle aux mélodies et aux harmonies vocales. Les voix sont sucrées et liquides, à la limite de l’angoissant, tout comme les claviers de Rod Argent, et cela, c’est son originalité. Ballard n’est pas un guitar-hero, ça se saurait. C’est même un gros branque, même comparé à Tony Iommi à la vue de la presse de l’époque. Ce qui n’est pas peu dire. Ce garçon est-il si détestable ? Non, car il est plutôt doué niveau composition (à l’époque). Généralement classé comme le pourvoyeur de chansons commerciales, c’est juger à priori le bonhomme.
Car l’ensemble du disque est finalement « commercial », c’est-à-dire facile d’approche : un son léger, une instrumentation fine à des années-lumières des soli à rallonges, des morceaux concis.


Il y a d’abord ces quelques notes de piano électrique liquides, et puis ces clapements de mains lointains sur la batterie. Il y a aussi cette voix suave, presque chuchotée, celle de Russ Ballard. La guitare est inexistante. Tout n’est que piano blafard, électricité maladroite. Ce n’est qu’un fantasme, une indiscrétion. Cette chanson semble n’être que le murmure d’un rêve que l’on n’ose avouer. C’est aussi un constat d’échec, celui du temps qui passe.
On voudrait que certaines choses ne changent jamais, où que l’on puisse revenir en arrière, afin de retrouver la flamme d’avant, lorsque l’on ne se connaissait pas aussi bien. Quand il y avait encore une part de mystère.

« Stepping Stone » semble presque un accident. La batterie semble sonner trop fort. Pourtant, cette rock-song sonne trop vicelarde pour être honnête. Les chœurs résonnent, tout le monde s’emballe, mais le caillou n’a que la trajectoire que l’on lui donne.
« Bring Your Joy », qui clôt ce disque, sonne entre piano-bar et soul-blues. Cela pourrait être chiant si il n’y avait pas cette retenue et cette science du silence qui rend ce titre si classieux.

Le disque se savoure comme une petite merveille, un petit paquet de bonbons que l’on achète sur une aire d’autoroute perdue et que l’on savoure sur cette route trop longue. C’est acidulé, frais, mais incroyablement émotionnel. Vous me croirez ou non, mais la suite ne sera pas terrible.

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