samedi 7 novembre 2009

IZIA

"Seulement voilà, Izia Higelin s’appelle simplement Izia. "

IZIA : « Izia » 2009

Certains s’étonneront de voir cette artiste ici, mais voilà, j’ai décidé de vous en parler. Et même pas en mal d’ailleurs. Plutôt en bien, en très bien même.
Pas que Izia n’ait pas bénéficié de promotion médiatique. Pas la plus grande promotion du monde non plus, ce n’est pas le dernier U2. Mais voilà, lorsque l’on parla d’elle, que ce soit dans le 20h ou dans le Grand Journal de Canal +, on accentua surtout sur le fait qu’elle avait 18 ans, et que c’était la fille de . La fille de qui ? De Jacques Higelin, qui d’ailleurs est encore vigoureux puisqu’il dut la produire aux alentours de ses 50 balais. Minorant cette analyse gynécologique, Izia est donc la fille de Jacques Higelin. L’homme n’en est pas à son premier rejeton chanteur, puisque Arthur H a défriché le terrain, mais sur le même plan musical, c’est-à-dire la chanson française un brin décalée.
Seulement voilà, la petite Izia joue du rock’n’roll, et du vrai. Du que la France n’a jamais connu de toute son histoire musicale. Les comparaisons faciles émergèrent, on parla de Janis Joplin à tout va.
Notamment dans le Grand Journal, où Izia joua en live. D’ailleurs je me permets une petite digression. Il est incroyable que dans cette émission, le son soit aussi mauvais. J’entends pour les rares groupes de rock qui s’y produisent. Du temps de De Caunes et de Nulle Part Ailleurs, le son était toujours impeccable. Là, le son est nickel pour tous les blaireaux, de Lily Allen à Lady Gaga en passant par Prince.
Mais seulement voilà, avec Izia, il y a de la guitare, et donc elle fut inaudible, un peu à l’instar de la prestation de Led Zeppelin à « Bouton Rouge » sur l’ORTF en France en 1969.
Quelque chose qui échappe totalement à Philippe Manœuvre et Tania Bruna-Rosso. Les deux branchouillards de service ne se branlèrent pas tant sur son disque que sur celui des Dead Weathers, par ailleurs particulièrement nul. Il ne suffit pas de s’appeler Jack White et de reprendre du Pentagram pour être un bon groupe.
Donc, la petite Izia passa vite fait sur tous les plateaux, on lui brisa les ovaires sur sa descendance, qui effectivement met à l’abri des bas-fonds rock’n’roll.
Seulement voilà, Izia Higelin s’appelle simplement Izia. Son disque n’est pas une bombe rock, lieu commun rabâché dans tous les forums et autres sites de chroniques. Il est une respiration, une vraie étape dans le rock’n’roll merde in France.
Car avant cette jeune femme, il n’est qu’une pâle copie, après elle il a des roubignoles. Bien sûr, il y eut Trust et Téléphone. Seulement voilà, la fort jolie demoiselle a le cran de chanter en anglais. Cela veut donc dire que son groupe français chante en ANGLAIS. Cela veut donc dire se tirer une balle dans le pied dés la sortie du disque. Et cela, la filiation Higelin n’y pourra rien. Car l’homme est en plein dans la chanson française. Il fut bien un peu rock’n’roll, vers 1975-1976 (avec Louis Bertignac à la guitare, qui depuis, se baigne avec Carla et Nicolas à Port Nègre, là, il faut qu’il meurt violemment). Mais Jacques l’insoumis aimait trop la chanson française pour s’en éloigner de trop. Et c’est le chemin inverse que vient de faire sa fille. Ce qui n’es toujours pas évident en 2009.
Car malgré une bonne promo sur son physique et son père, elle fait toujours les clubs. Et finalement, c’est cool. Cette jeune fille a le rock’n’roll, et va finalement le respirer de près dans les bars. Loin du confort de papa. Petite parenthèse pour vous dire combien je trouve cette jeune fille belle comme le jour. Loin des canons de beauté, un brin ronde, généreuse, sauvage, sexy (oh combien j’aime les talons et les jupes) elle est une beauté vespérale, qui de plus, à du talent et du goût. Sans concession.
Secondée par un groupe redoutable composé de Sébastien Dousson à la basse, Sébastien Hoog à la guitare et Grégory Jacques à la batterie, la belle peut tout donner. Leur cohésion est impeccable, ce qui n’est guère étonnant, puisqu’elle tourne avec eux depuis l’âge de 16 ans, c’est-à-dire depuis le début. Le fait qu’elle ait joué avec Iggy Pop à 16 ans, par contre, finalement, on s’en fout.
C’est son passage au « Grand Journal » qui m’a scotché. Une présence sauvage, bestiale, un vrai son rock, entre MC5 et Bellrays. Pour la voix, la comparaison Joplin est bidon. Janis avait une voix rocailleuse en permanence, purement blues. Izia, hurle, feule, minaude, et sa voix est plus proche d’une Betty Davis. Pourtant, la méfiance est là. Depuis le temps que cette émission nous déverse de la merde dans les oreilles.
Mais finalement, ce qui est vraiment primordial, c’est cette usage de la langue anglo-saxonne. Comme Little Bob Story, comme les Dogs. C’est la langue du rock, et elle la manie avec excellence. D’abord, il faut déjà être une sacrée gonzesse pour débuter un disque avec un titre du nom de « Back In Town ». C’est un mid-tempo heavy, sur lequel rugit la jolie Izia.
Cette fille est une tigresse. Elle est belle dans son attitude, mais aussi dans sa musique, redoutable. Car après le lourd « Back In Town », elle enchaîne deux locomotives du nom de « Lola » et « The Train » avant d’exploser sur le génial et punk « Hey Bitch ». Son chant entre hurlements blues et feulement de chatte brûlante terrasse.
« Let Me Alone » ouvre une autre dimension. La chanson démarre comme doucement, genre ballade rapide type Pink. Pourtant l’atmosphère se charge différemment. Les accords se font plus pressants, avant l’explosion électrique. L’écueil fut en vue, mais fut éviter. Izia est décidément une fille formidable.
« Blind » est un vrai funk, impromptu, inattendu dans ce contexte très électrique, mais quand on appelle Prince « Dieu »… Pourtant, il est un peu facile, et finalement pas assez original pour se mettre au niveau de ses prédécesseurs.
En fait, Izia va enchaîner quelques titres rock très féminins, avec introïts électro-acoustiques, puis explosions électriques. Tout cela semble plus conventionnel, mais largement plus rock’n’roll que la moyenne. Il n’y a finalement que trois petits accros sur ce disque : « Blind », « Sugar Cane », qui ne décolle guère, et puis ce « Life Is Going Down » un peu faible, pas désagréable, mais assez moyen, assez proche du gros rock fm américain.
Mais cela fait bien peu comparé à la qualité des autres chansons réellement incroyable de qualité, de concision et d’intégrité rock.
Incroyable aussi comme ce disque ce hisse largement à la hauteur du meilleur rock anglo-saxon, j’entends celui que l’on faisait il y a quelques dizaines années. Faites que cette jeune fille ne change pas, et garde le cap, car ce qu’elle vient d’accomplir est un petit miracle musical en terre Sarkozienne (et cela est bien pire que sous Giscard).

tous droits réservés

3 commentaires:

blitzkriegpop a dit…

Excéllent article... alors c'est elle Back In Town que j'entends parfois à la radio ? IMMENSE !!! Je ne savais pas qu'elle était française (mais qui l'aurais cru vu le Rock Made in France jusqu'alors, comme tu dit). Je vais me pencher sur ce disque, j'adore le single...

Olivier a dit…

C'est ce que j'appelle de la prise de risque. Etre une fille, jouer du heavy (et non du BB Brunes comme c'est tant la mode), chanter en anglais, avec des solos à l'ancienne dans ses chansons... Echec commercial assuré, mais succès d'estime immense, et possible que ça donne envie à d'autres d'en faire autant.

Anonyme a dit…

Ouaip, elle a du "chien" cette gamine. Douée et rebelle comme papa, avec juste ce qu'il faut de sincérité surranée...
Jean-Michel