BOB SEGER : « Smokin’ O.P.’s » 1972
Si les tubes du début des années 80 ont fait sa gloire, il serait malheureux d’oublier comme Bob Seger est un immense chanteur et compositeur.
Il aurait été facile de choisir le « Live Bullet », mais c’est sur ce « Smokin’ OP’s » que mon attention se fixe.
Bob Seger commence sa carrière professionnelle avec « Ramblin’ Gamblin’ Man » en 1968, puis va enchaîner les disques de Blues-Rock gorgé de Soul avec un talent sans commune mesure. En effet, Seger a un don majestueux : sa voix. Une voix gorgée de feeling, presque noire, proche d’Otis Redding, mais avec une rage plus proche du Rock’N’Roll, celui de Little Richard.
En 1972, Seger a déjà quelques albums de qualité à son répertoire, mais reste un artiste local. Les disques se vendent peu, et ses expéditions sur la côte Ouest sont des bides. Alors il continue à remplir des salles vers Detroit, sa ville d’origine. Car sa musique est bien celle du Detroit Sound : les influences Blues, Rock, et Soul se mêlent avec un côté prolo et urbain que Seger revendique.
Après la dissolution du Bob Seger System, son précédent groupe, courant 1971, il décide de s’entourer de musiciens locaux, qui sont aussi des amis. Ainsi, Mike Bruce, Skip Knape, et David Teergarden se joignent à Bob, et vont former le noyau dur de ce qui deviendra le Silver Bullet Band.
Bien qu’excellent compositeur, Seger va privilégier des reprises bien senties : « Bo Diddley » du même, « Love The One You’re With » de Stephen Stills, « If I Were A Carpenter » de Tim Hardin, ou encore « Hummin’ Bird » de Leon Russell. Point commun de toutes ces chansons, à priori plutôt Pop Music ou Rock, ce sera le traitement Soul que va leur infliger Seger.
Ainsi, « Bo Diddley » devient un monstrueux funk chaud comme la braise de 6 minutes, où la voix de Seger montre l’étendue de ses possibilités. « Love The One You’re With », en duo avec Pamela Todd et Crystal Jenkins, mêle un groove dévastateur avec des réminiscences Gospel. « If I Were A Carpenter » se mue en une superbe incantation Soul où voltige le clavier de Skip Knape. « Hummin’ Bird » se mue en un Blues moite. S’en suit « Let It Rock », monstrueux Rock’N’Roll sauvage, avec ce pedigree propre au groupe de Seger : une rythmique lourde, la voix rageuse de Seger, le son crade de la guitare. D’ailleurs, il est à remarquer l’absence de bassiste. C’est Knape qui assure les basses sur son orgue, comme Ray Manzarek des Doors.
« Turn On Your Love Light » retrouve le feeling Gospel. Puis “Jesse James” déboule comme une locomotive en rut. La rythmique galope, et le riff boogie graisse la machine. Sur « Someday », une chanson de Seger, celui-ci se permet une ballade avec violons, mais il faut avouer que sa voix empêche toujours la chanson de tomber dans la sucrerie. Quelques notes de piano s’égrènent dans l’air, et l’atmosphère s’alourdit, triste comme un mauvais dimanche d’hiver.
C’est l’excellent « Heavy Music », autre composition de Seger, qui vient clore ce disque. Devenu un classique de son répertoire, la chanson est une superbe synthèse du son Seger : Blues, Soul, et Rock’N’Roll.
Très orienté Good Time Music, cet album contraste avec l’engagement social dont fera preuve Seger sur des chansons comme “Beautiful Loser” ou “Turn The Page », toujours prompt à dépeindre l’Amérique des petites gens. Il faudra néanmoins attendre encore 3 ans avant le vrai succès commercial avec le Silver Bullet Band, et son « Live Bullet ».
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