vendredi 14 août 2009

VACANCES

Chères lectrices, chers lecteurs,


Je pars en vacances quelques jours. inutile de vous dire que je ne pourrai mettre à jour ce blog durant cette période. Je vous donne donc rendez-vous le 1er septembre. D'ici là, portez-vous bien et merci encore de votre fidélité et de vos commentaires.


A bientôt et Keep On Rockin'


SAVAGE

"Tout le disque se consume sur une vague sonique, entre deux sustains, sur fond de guitares, de crashes de cymbales et de chant furieux."

SAVAGE « Loose’N’Lethal » 1983

1983 fut une année charnière pour le heavy-metal. Bien que possédant la suprématie sur le monde rock de l’époque, et à côté duquel la new-wave semblait bien fade, le genre va subir de profonds remous.
D’abord, il y a la disparition de plusieurs grands du genre : Black Sabbath (avant de réapparaître en 1985), Thin Lizzy, UFO. Les gros vendeurs sont alors des rescapées des fameuses années 70 : Ozzy Osbourne, Whitesnake (avec David Coverdale), et Rainbow (avec Ritchie Blackmore).
En ce qui concerne le vent nouveau, c’est-à-dire la New Wave Of British Heavy-Metal, l’espoir retombe. Seuls quelques rares groupes ont réussi à percer : Def Leppard, Saxon et bien sûr, Iron Maiden. Pour le reste, les quelques groupes restants, ils finiront englués dans le hard-fm ou le mauvais son trashy. Car de la Bay Area arrivent des groupes encore plus énervés, inspirés de cette fameuse NWOBHM, les Slayer, Anthrax ou Metallica. Le Trash, puis le Death arrivent, et le heavy-metal à l’ancienne va prendre une sérieuse claque.
Alors, autant vous dire que les groupes anglais de la NWOBHM qui enregistrèrent en cette sombre année 1983 semblaient déjà condamnés.
Savage fut de ceux-là. Le groupe commença sa carrière vers 1978, lorsque le guitariste Andy Dawson et le bassiste Chris Bradley, grands fans de UFO et de Thin Lizzy, décidèrent de jouer ensemble. Il y eut évidemment des démos durant ces années, qui ne restèrent pas inaperçus, mais ne suscitèrent pas de contrat discopgraphique.
C’est le label Ebony qui signa le désormais quartet complété par Wayne Renshaw à la guitare et de Mark Brown à la batterie. Petit label qui signa également les groupes Chateaux ou Grim Reaper, il n’eut jamais les moyens de promouvoir ses artistes au-delà de la Grande-Bretagne. Mal parti.
« Loose’N’Lethal » est un sacré disque. Ce premier album de Savage paru en 1983, donc, est un concentré d’énergie et de rage. On pourrait même y discerner des éléments trash avant l’heure.
Car dés « Let It Loose », le cadre est fixé : guitares saturées, rythmique en embardée, chant sauvage, on est dans le heavy agressif. Et ce n’est pas le plombé « Cry Wolf » qui suit qui va dévier la trajectoire de cette rocket sonique.
Mais il n’y a pas que cela. Il y a aussi ce « Ain’t No Fit Place ». Superbe pièce épique, le titre explose sur un magnifique solo de Dawson, qui emmène la mélodie dans les confins de la mélancolie urbaine, noire et charbonneuse.
Mais il y aussi ces purs instants d’électricité : le titanesque et trépidant « China Run » avec encore un solo de Dawson hallucinant, qui semble totalement possédé. Il y a aussi « White Hot », menaçant et crade.
Tout le disque se consume sur une vague sonique, entre deux sustains, sur fond de guitares, de crashes de cymbales et de chant furieux.
Les démos ajoutées sur la version cd valent également le coup, ne serait-ce que pour constater le travail effectué par le combo de puis ses débuts. Mais aussi pour constater la capacité de percussion de ce combo infernal.
La suite, ce sera l’album « Hyperactive » en 1984. le son se fait plus fm, avec ce son de batterie pourri d’écho et des soli de guitares dévastés par les coups de vibrato à la Van Halen et les bends suraigus à la Randy Rhoads. Il y a bien sûr beaucoup de bonnes choses sur ce disque, comme sur ceux de la reformation en 1995 (suite à la reprise faite par Metallica de « Let It Loose »), mais aucun des disques suivants ne retrouvera cette magie folle, cette urgence, cette classe rock’n’roll. Dommage, car Savage aurait pu être une vraie alternative au metal fm et autres pièces progressives montées en neige.
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samedi 8 août 2009

THE BLACK KEYS

"C'est véritablement un état d’esprit qui revient à la vie."

THE BLACK KEYS : « Thickfreakness » 2003 et « Magic Potion » 2006

Lorsque j’ai commence à écrire pour le magazine “Blues Again !”, d’entrée, mes conceptions du blues n’étaient pas celles des fondateurs du journal.
Comme beaucoup d’amateurs de cinquante ans, on ne badine ni avec les références, ni avec les forçats du genre qui écument les bars de France et de navarre.
Le seul souci, c’est que cela entraîne d’une part une grande rigidité au niveau de l’appréciation musicale, et d’autre part, une grande complaisance vis-à-vis des artistes locaux et internationaux dont le talent n’est pas toujours avéré.
Personnellement, j’ai toujours eu une vision sentimentale et lyrique du blues. Pour moi, le genre est avant tout source d’émotions. J’ai toujours eu une vision fantasmée du blues. Une musique faites de sueur, de rage, de feeling, de son heavy, de mélancolie et de misère.
C’est la musique des prolos des villes industrielles qui vont s’exploser les neurones sur des sons qui leur parlent. Mais ce n’est certainement pas une bande de blaireaux pleurnichards qui roulent en Harley, qui boivent de la bière par tonneaux et qui gagnent deux briques par mois dans une entreprise de management commercial qui peut jouer le vrai blues. C’est le problème du blues en France, par exemple.
L’autre problème, c’est la gangrène démonstrative, tout ce blues pseudo-Chicago hendrixien à soli à rallonge, vide de sens et d’âme. Ce genre de musique pullule, mais l’esprit, le vrai a disparu. Le blues est devenu comme le jazz : une musique élitiste pour vieilles badernes bourgeoises qui comptent les éditions Stax ou Chess dans sa collection, et se gaussent du néophyte ne connaissant pas l’inédit de Muddy Waters de 1958 sur le label Fontana.
L’esprit prolo, la rage, la colère, la revendication a disparu, et jusqu’à présent, aucun disque que j’ai eu à chroniquer n’a fait preuve du centième de cette matière.
Ma déception a alors grandi, ne voyant rien à l’horizon qui soit compatible avec ma vision. Jusqu’à ce que… C’est un ami qui entendit l’album « Thickfreakness » à la FNAC. Il l’acheta et me dit combien il était formidable. Bien que nos goûts soient communs, son fanatisme de Dylan me rendit un poil méfiant. Mais là… The Black Keys est un duo composé de Dan Auerbach à la guitare et au chant, et de Patrick Carney à la batterie.
Dire que ce disque me redonna espoir est faible. The Black Keys est un immense groupe de blues gras et roots, bien dans la lignée de Hendrix, mais surtout de Hound Dog Taylor.
C’est véritablement un état d’esprit qui revient à la vie. C’est celui de l’attitude, de l’émotion plutôt que la référence. Ici, on se fiche bien de savoir si l’on est plus proche du blues noir ou blanc. L’ensemble fusionne en une musique sauvage et électrique faisant copuler Led Zeppelin, et John Lee Hooker, formidable geyser de riff en fusion et de slide râpeuse.
Il y a surtout ce côté brut de fonderie, cet aspect artisanal propre au vrai blues des pionniers. Pas question de claviers, de cuivres. Il n’est même pas question de basse, c’est vous dire.
Mais ce qui frappe, outre la guitare incandescente d’Auerbach, c’est la voix du garçon : une voix chaude, profonde, presque noire, justement. Ici, pas de hurleur à la voix nasillarde, comme Jack White des Whites Stripes. D’ailleurs les Black Keys y sont souvent comparés, à tort.
En effet, si les Stripes ont opté au départ pour une sorte de blues rugueux et irrévérencieux, entre pop 60s et vision arty, et les Keys optent pour une optique plus Rock, plus hargneuse, plus saine aussi. Le but, c’est de tirer du blues le meilleur de l’énergie et de cette colère intérieure que seul le blues peut faire ressortir.
Sur « Thickfreakness », les Keys sont arrivés à la synthèse parfaite entre le rock garage, le blues et le heavy-rock. On oscille entre titres puissants et blues cancéreux, râclant l’âme humaine au plus profond. Toutes les chansons sont géniales.
Par la suite, les Keys vont avoir du mal à renouveler un tel coup de grâce. Néanmoins, l'avant-dernier, « Magic Potion », est excellent.
Le duo a décidé de jouer très fort, et l’on sent la musique versée vers le heavy-blues zeppelinien. Il s’agit de leur disque le plus hard, le plus violent. Du percutant « Your Touch » en passant par le venin de « Just A Little Heat », jusqu’à l’enrochement de riffs granitiques de « Black Door », ce disque est une série de claques sidérurgiques.
On peut regretter la petite étincelle qui pourrait transformer certains morceaux en titres purement magiques, comme sur « Thickfreakness », mais force est de constater que malgré cela, « Magic Potion » est un album que beaucoup de groupes aimeraient sortir. Mais surtout, il ouvre à nouveau la porte à un blues hérité des années 60, fusion du blues noir des années 50 et du rock des années 60-70. Ce formidable alliage, loin des clivages et des querelles de spécialistes offre un grand souffle d’espoir dans une musique que l’on croyait perdu, alors que justement, l’homme n’a jamais eu autant le blues que ces derniers temps.



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